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26 mai, par Raymond Lauret
Un séminaire organisé par le Parti Communiste Réunionnais a eu lieu le samedi 17 mai, à l’Espace Candin à Saint-Denis pour le centenaire de la naissance de Paul Vergès. Voici le contenu de l’intervention de Raymond Lauret, ancien adjoint de Paul Vergès à la Mairie du Port et ancien trésorier du PCR.
Nous étions à la fin de l’année 1969. Je venais d’apprendre que, pour les services des Renseignements Généraux et donc de la Préfecture de la Réunion, j’étais un “dangereux crypto-communiste” auquel il était hors de question que l’on permette de bénéficier d’une bourse pour poursuivre des études supérieures en métropole. J’étais marié et père d’un petit garçon. Je décidais alors de réagir et, pour la première fois de ma vie, je rencontrais en tête à tête Monsieur Paul Vergès. C’était à St Denis dans les locaux de Témoignages, là où il avait ses bureaux. Je lui racontais tout de ma vie. Mon père, le forgeron Théophane Lauret, habitait à Trois Bassins. C’est dans cette commune, qui avait toujours voté massivement à droite, qu’avec deux autres amis il mena en 1945 campagne pour Léon de Lépervenche à l’occasion des élections de députés. Léon de Lépervenche et Raymond Vergès étaient candidats du CRADS et militaient pour que La Réunion cesse d’être une colonie et devienne un Département français. Et à Trois Bassins, Léon de Lépervenche l’emporta assez largement. Le 19 Mars 1946, notre île devint, avec la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, l’un des quatre Départements français d’Outre Mer. Et moi, je naquis un mois plus tard, le 14 avril 1946. Cinq ans après, mes parents s’installaient au Port. C’est dans cette ville que, dès l’âge de 16 ans, je participais aux protestations contre les violences et les fraudes électorales, choses qui me scandalisaient. C’est cela qui fit que je serais plus tard considéré contre un “dangereux crypto-communiste”. Paul Vergès m’écouta et me parla longuement. Je fus conquis par sa vision et séduit par son engagement politique. Et quand je le quittais, j’étais devenu quelqu’un d’autre. En Novembre de l’année 1970, il m’appela. Je le voyais. Il m’informa qu’il se présentera aux élections municipales de Mars 1971 dans la commune du Port et qu’il aimerait bien que je sois sur sa liste. J’acceptais spontanément. Février 1971. Je participe à ma première réunion des cellules du PCR au Port. On y présentait les candidats du Parti pour les municipales. A ma grande surprise, j’étais en seconde position sur cette liste, juste derrière Paul Vergès. Je compris très vite que des militants de toujours comme Ariste Bolon, Raymond Hoareau, Odette Mofy, Jean-Baptiste Rocheland, Denis Irouva, Gilbert Le Toullec, Serge Bourhis, Eugène Rousse ou encore Roland Hoareau avaient accepté ce qui était une suggestion de Paul : avoir en bonne position un jeune de 25 ans. Je pris évidemment toute ma part dans la campagne électorale. Le 21 Mars 1971, la liste de Paul Vergès l’emportait face à celle du Maire sortant André Gontier. Le soir, devant la Mairie, dans une foule compacte et enthousiaste, je fus approché par un employé municipal qui me dit que Monsieur Gontier souhaitait me voir. Je connaissais bien celui qui avait été mon dentiste et qui présidait le club de foot de la Jeanne d’Arc. Je montais à l’étage et, dans son bureau de Maire, André Gontier, après m’avoir félicité, me dit qu’il aimerait “bien voir Monsieur Vergès”. J’allais aussitôt voir Paul, lequel accepta et monta avec moi jusqu’au bureau de celui qui venait d’être battu. Et là, sous mes yeux, André Gontier salua son vainqueur et lui dit ceci : “Monsieur Vergès, je suis satisfait que ce soit un homme comme vous qui prenne ma succession. Je suis certain que vous saurez poursuivre le travail que j’ai commencé.. Et si vous êtes d’accord, je vous propose que ce mardi, vous et moi, dans ma voiture, nous fassions le tour de la ville. Je vous indiquerais ce qui a été déjà entrepris et les voies qui ont été les miennes pour que notre ville avance…”. Ce qui fut fait comme convenu. Vint la première réunion des élus avec pour ordre du jour l’élection du Maire et de ses adjoints. Juste avant, au domicile de Jean-Baptiste Rocheland, Fabien Lanave me rencontra et m’expliqua que, comme Ariste Bolon et Raymond Hoareau vont bientôt prendre leur retraite professionnelle, il est bon qu’ils soient le premier et le deuxième adjoint au Maire. Et moi je serai le troisième adjoint. Ce que je compris bien évidemment. J’allais donc commencer à côtoyer un Maire pour lequel j’avais le plus grand respect. Un respect qui se transformera très vite en admiration…
Paul, un Maire d’exception…
Deux semaines après son élection, Paul avait en tête les grands principes d’aménagement et de développement de la cité maritime qu’il importait d’arrêter. Cela passe par la réappropriation de la façade maritime par les portois, avec le libre accès à la mer. Il a fallu sur ce plan affronter les réticences de la DDE et de la CCIR, lesquelles finiront par admettre le bien fondé de la vision du Maire du Port. Cela passe également par une vaste ambition de plantation et de verdissement afin de transformer une commune dont le premier nom avait été “La Plaine des Galets”, en relation avec le fait que son territoire avait été, au fil des siècles, façonné par tout ce que ce gros cours d’eau pouvait bien charrier comme masses de pierres. La belle idée qui nous vint : associer fortement les élèves de nos écoles primaires et du collège à nos campagnes de plantation, ainsi que les familles et les comités d’entreprises. Et aussi réaliser des parcs boisés ici et là. Pour cela fut montée une pépinière, la première pépinière municipale de toute l’île. Et cela dans le cadre d’une convention avec l’ONF. Tout naturellement, il importait de répondre aux besoins primaires des habitants qui souffraient d’un déficit de logements, de carence en alimentation en eau et du manque d’établissements en écoles primaires et maternelles. Ce sera un immense chantier. Par une fiscalité locale maîtrisée et lisible à moyen et long terme, il s’agissait d’encourager les grandes entreprises à s’installer sur des Zones Industrielles et Commerciales que la Commune développerait. C’est ainsi que sont venues au Port des entreprises comme la GTOI, la SBTPC et d’autres encore, entreprises qui ont créé pour les portois et les portoises des centaines d’emplois.. D’où une indispensable maîtrise du foncier par les instances publiques et para publiques, Commune, Département, Société d’Aménagement comme la SEDRE ou Bailleurs sociaux tels que la SIDR ou la SHLMR… Tout ce qui était nécessaire a été acheté, tels les terrains Saint Ange Doxile qui bordaient le quartier Olivier Manès jusqu’aux limites de la Ravine à Marquet vers La Possession. Les ayant-droits ont été retrouvés un peu éparpillés dans le monde grâce à un réseau de Notaires à La Réunion (Maîtres Lemerle et Atectam) et à l’île Maurice (Maître Avrillon). C’est le Secrétaire de Mairie, Monsieur Amode Houssen recruté par Paul deux mois après son élection, qui s’attela avec une grande réussite à cette tâche délicate. Monsieur Amode sera à la tache tous les jours et cela avec une exceptionnelle réussite. La ville du Port lui doit beaucoup. Et c’est tout naturellement que, lorsque Paul prit en 1998 la présidence de la Région, Monsieur Amode fut invité à le rejoindre pour occuper le poste de Directeur Général… Personnellement, je n’oublierai jamais que, en Mai 1971, rentrant de son séjour en métropole, Paul remit à l’adjoint chargé entre autres des Sports que j’étais un exemplaire des statuts des Offices Municipaux des Sports qui existaient en France en me disant : “Lis cela attentivement et vois comment on peut faire, en matière de Sport, quelque chose qui ouvre à notre île les portes d’une vraie et grande politique qui soit en quelque sorte révolutionnaire”… Je compris qu’il nous fallait faire autrement et donc mieux qu’en France. Avec les Albert Mourvaye, Mickaël Rosalie, Guy Marbois, Maurice Casimir, Jean Paul Pla, Patrick Lafosse, Chantale Ronsard, Joël Gauvin et cent autres, avons-nous réussi ? C’est aux portois et à l’opinion publique de se prononcer. Paul Vergès Maire du Port, c’est aussi le grand Parc Boisé réalisé autour d’un plan d’au en cœur de ville… C’est également l’endiguement de la Rivière des Galets qui, en plus de la protection des espaces habités de la Commune, permettra de réaliser des zones d’activités économiques et qui verra la Municipalité de St Paul se mobiliser elle aussi à cette occasion pour la protection de sa rive et valoriser les terrains limitrophes aujourd’hui consacrés au développement économique de Cambaie… C’est encore l’incitation faite aux entreprises d’installer sur leurs toitures des panneaux photovoltaïques… Nous ne pouvons pas ne pas mettre en avant également la zone cultuelle réalisée au cœur de la ZUP, là où quatre religions différentes ont pu construire, les unes à cotés des autres, leurs lieux de prières et de cérémonies comme pour montrer que notre île est bien pour le monde entier un exemple en matière du nécessaire dialogue inter-religieux… Et puis, notre cimetière paysager, avec ses multiples feuilles qui évoquent l’arbre de la vie qui se poursuit sous une autre forme. C’est l’un des très rares cimetières dans le monde entier où nos frères musulmans peuvent enterrer leurs morts dans la même enceinte que tout autre citoyen. Me reviennent ici ces mots un jour prononcés par le Docteur Raymond Vergès : “Le roc de notre patrimoine est taillé dans cette multitude de vertus obscures qui n’ont pas besoin pour s’épanouir de l’appât de récompenses et constituent le plus solide garant de notre redressement…”. Ces mots de son père, Paul, sans aucun doute, les a toujours eu au fond de sa mémoire et de son cœur. Son engagement, commencé dès l’âge de 17 ans lorsque, avec son frère Jacques, il choisit de rejoindre l’armée du Général De Gaulle pour défendre le monde contre le nazisme, oui, son engagement durant toute sa vie en témoigne.
Quand Paul me charge de la trésorerie du Parti…
A cette époque, le Parti Communiste Réunionnais n’avait pas une existence légale. Ses statuts (si statuts il avait) n’étaient pas déposés en Préfecture. Son existence, c’était ses membres, ses Congrès, ses réunions de sections ou de cellules, ses idées développées sur la place publique ou dans son journal Témoignages. Et l’application de ces dernières se manifestait dans la présence de ses élus dans les conseils municipaux, au Département ou encore à l’Assemblée Nationale. Le trésorier du Parti était alors notre camarade Julien Ramin. Julien avait ouvert sous son nom un compte au Crédit Agricole. Les cotisations et autres rentrées d’argent au bénéfice du PCR étaient versées sur ce compte dénommé tout simplement “Julien Ramin”. Il ne pouvait en être autrement. Et tout le monde avait une totale confiance en celui qui sera plus tard le premier adjoint d’Elie Hoarau à la Mairie de Saint-Pierre. En accord avec Julien, Paul me demande de m’occuper de la trésorerie du Parti. “Fais pour le mieux” se contentera-t-il de me dire alors. Et moi d’en informer aussitôt Monsieur Henri Atectam, le responsable du cabinet d’Expertise comptable que nous avions choisit à l’OMS du Port. J’ai toujours en mémoire les conseils qui me furent alors donnés. “Mon cher Raymond, vous venez de prendre là une responsabilité particulièrement grande. Être le trésorier du Parti dont le Secrétaire Général est un homme comme Paul Vergès fait de vous quelqu’un qui sera surveillé voire même espionné par les Renseignements Généraux et la Police. Tout ce qui se passera sur les comptes du Parti sera passé au peigne fin. Il s’agit pour certains de pouvoir enfin mettre la main sur Monsieur Vergès à travers les manquements à la loi que vous commettriez. Il sera soupçonné de vous avoir dit de faire ceci ou cela, ou tout simplement de savoir que vous avez pu commettre telle illégalité. Faites très attention. C’est Paul Vergès qui les intéresse…”. J’entends bien la mise en garde de Monsieur Atectam. Et nous convînmes qu’il fallait créer l’AER (Association des Elus Républicains), association qui ouvre alors un compte en banque, compte qui reçoit alors le chèque de Julien et qui va recueillir le montant des indemnités des élus et toutes autres cotisations. Quelques années plus tard, lorsque François Mitterrand rendra possible le versement par des sociétés d’une contribution limitée aux partis politiques, l’AER deviendra l’AFPCR (Association pour le Financement du PCR), association qui financera les dépenses de notre Parti. Plus que jamais, j’avais en permanence en tête ce que Monsieur Atectam m’avait dit. Les quelques tentatives qui me valurent d’être convoqué chez des policiers en charge d’enquêtes suite à des lettres anonymes (mais nous devinions bien qui en étaient les auteurs) envoyées au Procureur de la République ont toutes connu le même sort : sans suite. J’ai même, le 23 Mai 1998, reçu de Monsieur le Procureur Bernard Legras la lettre suivante, quelques jours avant son départ pour un nouveau poste en France : “..J’ai été très sensible à votre message, mais j’ai dû attendre la confirmation de ma nomination pour vous faire réponse. J’ai toujours reconnu en vous un interlocuteur digne, responsable et ouvert. J’ai pleinement confiance dans l’avenir de La Réunion et je sais que vous faites partie de ceux qui feront vraiment et enfin “décoller” cette région. Bien cordialement…B. LEGRAS “… Cette lettre, vous vous en doutez, je la garde précieusement. Pour revenir à la question qui m’a été posée sur la trésorerie du Parti Communiste Réunionnais, disons qu’elle était alimentée par les indemnités que de très nombreux élus ont alors accepté de reverser. Cela était naturel. Ce qui n’a pas empêché que je sois de temps en temps convoqué à la brigade financière pour répondre au besoin d’avoir des renseignements sur tel ou tel point de nos recettes ou de nos dépenses… Paul était bien entendu mis au courant de ces convocations. Jamais, oui, jamais, il ne m’a demandé comment les choses se sont passées. Aujourd’hui, avec le recul, je me dis qu’il avait une totale confiance en moi. Et lorsque je lui ai montré la lettre que m’avait envoyée le Procureur Bernard Legras, il eut ces mots : “Voilà quelqu’un qui ne s’est pas fait manipulé… “. Cela m’a suffit.
Soutenir Nelson Mandela…qu’importe le risque que l’on prend alors.
Le 14 Septembre 1989. Frederik De Klerk est le nouveau Président de la République d’Afrique du Sud. Aussitôt, il annonce son intention de libérer dans les meilleurs délais Nelson Mandela, le leader de l’ANC qui a été jeté en prison en Août 1962, soit depuis 27 ans. Le 11 Février 1990, Nelson Mandela sort de prison. Il est libre. Trois mois plus tard, Paul Vergès m’apprend qu’un mouvement de solidarité dont fait partie son frère, l’avocat Jacques Vergès, s’est mobilisé pour trouver des fonds qui permettraient la formation de dirigeants de l’ANC. En effet, dans quatre ans, en 1994, aux prochaines élections présidentielles sud africaines, Nelson Mandela sera à coup sûr candidat et pourrait l’emporter. Il est importants que les dirigeants de l’ANC, qui n’ont connu jusqu’à présent que le combat de la résistance contre la répression, soient bien formés pour être en mesure de diriger leur pays à coté de Nelson. Et Paul de me confier qu’il a approuvé la proposition faite au PCR de participer à cette collecte de fonds financiers. Je ne peux qu’être d’accord moi aussi. Paul me demande alors :” Combien avons nous d’argent en banque ?”… Et moi : “Environ 1.200.000 francs ?” Alors Paul : “On pourrait donner la moitié. ?…” Et moi : “Pas de problème pour 600.000 francs…C’est pour quand ?” Paul : “Le plus vite possible. Dans une semaine, Françoise et Ginette partiront en Afrique du Sud pour des vacances. En fait, elles emporteront l’argent, chacune une moitié, pour leurs frais. En réalité, une fois arrivées, elles remettront cet argent aux responsables de l’ANC. C’est ce qui est proposé par Jacques… Attention. Silence le plus total sur le motif de ce retrait. Financer l’ANC est considéré comme un crime pour la loi française… Il y a de gros risques.” Une heure plus tard, je suis à la Banque de la Réunion au Port, là où l’AFPCR a son compte. Je demande à voir un employé que je connais bien et à qui je dirais que nous voulons retirer 600.000 francs. “Il me faut quelques heures pour ramasser ces billets. Tu peux repasser cet après — midi vers 16 heures ? N’oublie pas d’apporter une petite valise. 600.000 francs, ça occupe de la place…”. L’après midi, à 16 heures, je suis là. Mon interlocuteur m’attend. Il prend la valise. Quelques instants plus tard, il revient, me montre les billets qui remplissent la valise, me propose de lui faire confiance sur le montant. Ce que je fais. Et maintenant, il me faut lui indiquer le motif de ce retrait pour la direction de la banque. Je le lui donne : “Pour les activités du PCR..”. Çà lui convient. Aussitôt, je file pour remettre tout cela à Paul. Lequel me demande s’il peut garder la valise. C’est oui…”Pas un mot, hein…pas un mot de cela à quiconque”. Je le lui promets. Je le lui promets tout en ayant l’impression que, si pour une fois Paul insiste pour que je sois prudent, c’est qu’il y a un véritable gros risque. Et les jours s’ écoulent. Passent un, deux, trois mois… Passent une, deux, trois années. Fin 1993, la campagne électorale pour l’élection du Président de l’Afrique du Sud bat son plein. Les pronostics donnent Nelson Mandela en tête des intentions de vote. Ce qui se révèlera vrai puisque, le 10 Mars 1994, celui qui a connu la prison durant plus de 27 ans sort vainqueur de l’élection. Le chemin qui a été le sien est salué par le monde entier. Il peut mettre en place un gouvernement avec des ministres formés pour être capables d’assumer de hautes et lourdes responsabilités. Quelques années plus tard, Elie me confiera que ce ne sont pas Françoise et Ginette qui ont transporté les sous pour l’ANC, mais que c’est lui, lors d’un de ses déplacements à Paris pour son travail de député, qui apporta la fameuse valise, valise qu’il remit à Jacques Vergès. Voilà, vous connaissez tout d’un moment qui compte dans la vie de notre Parti Communiste, un Parti qui a su prendre ses responsabilités quand le bon sens et l’Histoire le demandaient. Paul avait sans doute retenu ce que Talleyrand nous a soufflé quand il déclarait que “Administrer, ce n’est pas tout empêcher au nom du règlement mais tout faciliter au nom du bon sens…”. Voilà, c’est dit.
De Pierre Lagourgue à Maurice Tomi…
Pour terminer ce petit tour d’horizon, j’évoquerai bien volontiers quelques aspects peu connus de la personnalité de Paul Vergès dans ses relations avec d’autres responsables de la vie réunionnaise, des personnes qui n’étaient pas membres ou proches du PCR. Je n’ai pas la prétention de connaitre tous ceux et celles que Paul a rencontrés et avec qui il a eu à travailler pour faire avancer La Réunion. Je citerai seulement Pierre Lagourgue, homme politique de droite qui a présidé la SHLMR et avec qui Paul a beaucoup fait pour la ville du Port. C’est tout naturellement que cet homme a pu compter sur le soutien des grands électeurs du PCR lors d’une élection sénatoriale et le temps qu’il a consacré à la Présidence de la Région Réunion. Je pense aussi à la suggestion que m’avait faite Paul de présenter au Président Lagourgue un plan régional d’équipement sportif, plan qui fut mis en œuvre très rapidement. Je puis également témoigner de la grande estime et du profond respect que Monseigneur Gilbert Aubry et Paul se portaient mutuellement. Ce n’est pas un hasard si celui qui était alors évêque de La Réunion est venu à Sainte Suzanne s’incliner dans une profonde prière devant le corps de Paul alors décédé. Et lorsque récemment je disais à Gilbert Aubry que Paul m’avait un jour confié : “Je ne crois qu’en ce que je vois, mais la résurrection du Christ m’interpelle…”, notre ancien évêque me répondit que cela ne le surprenait pas… Le 19 Mars 2006, date anniversaire des 60 ans de la Départementalisation de la Réunion, Jean-Louis Debré, alors Président du Conseil Constitutionnel, vient à la Région saluer son Président Paul Vergès. Sous les regards de tout le monde et de toute la presse, c’est une accolade spontanée et chaleureuse, celle-là même qu’Ary a choisi pour illustrer la couverture d’un de ses ouvrages. Cette accolade se voulait un signe fort de la réconciliation entre deux hommes qui, indirectement, ont eu à s’affronter dans leurs vies. N’était-ce pas là aussi un message d’une toute autre portée qui porte sur un des plus grands adversaires que Paul et le PCR ont eu et combattu ?… Je terminerai ces lignes par une phrase que Maurice Tomi a un jour lancée. Deux mots avant sur les cases Tomi. Ces petites maisons que l’entrepreneur d’origine mauricienne mais installé à La Réunion avait rendues célèbres tant elles étaient attendues par les gens de condition sociale modeste…oui, ces cases Tomi, on ne les a pas oubliées. Au Port, que ce soit sous la mandature d’André Gontier ou de Paul Vergès, la ville en a fait construire des centaines et des centaines. Et Maurice Tomi, même s’il se présenta un jour aux cantonales dans notre cité maritime et fut largement battu par Bruny Payet, ne pouvait qu’être reconnaissant à Paul. En Septembre 1973, dans une réunion, en ma présence, Maurice Tomi a lancé : “Ah ! les Communistes… Dommage que vous soyez communistes…”. J’ai aimé…J’ai alors pensé offrir à sa fille une photo de son père sur laquelle j’ai fait imprimé ladite phrase… Sur ce, je vous dis merci pour votre attention. Et en espérant que vous ne vous êtes pas trop ennuyé…
Raymond Lauret
source : https://www.temoignages.re/politique/actualites-politiques/centenaire-de-la-naissance-de-paul-verges-intervention-de-raymond-lauret