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Publié le 15 janvier 2025
Dix ans après les attentats contre la rédaction de Charlie Hebdo, en ce début d’année 2025, les menaces sur la liberté d’expression restent plus que jamais préoccupantes.
Dans l’Hexagone, la lutte idéologique pour « lepéniser » les esprits s’inscrit au cœur de la stratégie de la fachosphère, incarnée par le Rassemblement national (RN) et dans les cercles catholiques traditionalistes que représente l’oligarque Pierre-Édouard Stérin.
Pour parvenir à leurs fins, il leur faut construire une fabrique d’opinion au travers des médias de la galaxie illibérale afin de diffuser leurs thèses (immigration, préférence nationale, du tous contre tous, etc.), alliant pensées complotistes et identitaires, et en jouant sur les provocations, les fake news pour occuper l’espace médiatique.
Le groupe de l’ultra-conservateur Vincent Bolloré constitue l’une des figures de proue de cette stratégie du fait de sa puissance médiatique (Cnews, JDD, Europe1, Canal+...). Le milliardaire breton, au-delà de son rôle d’industriel, n’avait-il pas été l’organisateur du rapprochement entre le RN et Éric Ciotti ?
En vue de leur croisade, Vincent Bolloré avec Bernard Arnault (Les Échos, Le Parisien, Paris Match…), Rodolphe Saadé (BFMTV) et Dassault (Le Figaro) ont ainsi poussé à prendre le contrôle de l’ESJ, une école de journalisme non reconnue par la profession, en incluant le groupe de presse catholique Bayard, ôlé par la congrégation des Augustins de l’Assomption.
Mais le véritable coup de force pour imposer une orientation ultra conservatrice au groupe Bayard (éditeur du Pèlerin, La Croix, Notre Temps… et de nombreux titres de la presse de la jeunesse) a été la nomination ’Alban du Rostu comme « directeur de la stratégie et du développement » du groupe, le bras droit de Pierre-Édouard Stérin, exilé fiscal en Belgique, qui a échoué à racheter l’hebdomadaire . Sa est estimée à 1,4 milliard d’euros.
Comme l’a révélé l’Humanité, Alban du Rostu est « une figure parmi les « fondateurs et administrateurs » de Périclès, aux côtés de Pierre-Édouard Stérin et de François Durvye, le patron du fonds d’investissement Otium Capital, appartenant aussi au milliardaire, et par ailleurs conseiller de premier plan de Le Pen et Bardella ».
La mobilisation des salariés de Bayard et de leurs syndicats a eu gain de cause en déjouant le coup de force. Mais pour combien de temps ?
En ce début d’année 2025, le décès de Jean-Marie Le Pen a été l’occasion pour les chaînes en continu - propriété des Bolloré et autres Saadé - d’un scandaleux déluge de temps d’antenne consacré au chantre de l’extrême droite antisémite et anticommuniste. La reconduite au sein du gouvernement Bayrou de Rachida Dati comme ministre de la Culture - qui a initié le projet de fusion-holding de France Télévisions, Radio-France, l’INA et France Médias Monde - a de quoi inquiéter les salariés de l’audiovisuel public où il est prévu 150 millions d’euros de budget en moins en 2025.
Mais aujourd’hui, une décennie après la tuerie contre Charlie, se profile depuis les États-Unis une grave menace pour la liberté de caricaturer. Deux grands journaux ont renoncé à faire paraitre des dessins de presse au New York Times et au Washington Post où la dessinatrice Ann Telnaes, prix Pulitzer, a quitté le journal devant le refus du quotidien de la publier.
Tout aussi préoccupante apparait l’instrumentalisation de la liberté d’expression sur laquelle jouent le libertarien Elon Musk (X, ex-Twitter) et Mark Zuckerberg (Meta, Facebook etc.) qui, dans la droite ligne de la politique de dérégulation du futur président américain Donald Trump (intronisé le 20 janvier), ont décidé de l’arrêt du « fact-checking » (vérification des informations). Leur plateforme devenant ainsi des outils de désinformation sur les réseaux sociaux, à l’instar du milliardaire Musk faisant de son media une tribune de propagande sur X avec Alice Weidel, la dirigeante de l’AfD (parti de l’extrême droite allemande).
D’ores et déjà devant ces dérives, le quotidien espagnol La Vanguardia a annoncé qu’il ne publierait plus de contenus sur X suivant la décision prise par le quotidien britannique The Guardian.
En France, face à la poignée des milliardaires qui détiennent les principaux leviers médiatiques : radios, télévisions, presse écrite, médias numériques, etc., il en va du sort de la démocratie de mener et gagner la bataille pour le pluralisme et la qualité de l’information.
P. K.
Article publié dans CommunisteS, numéro 1025 du 15 janvier 2025.
source : https://www.pcf.fr/fachosphere_en_quete_fabrique_opinion