Cuba est confrontée à la plus grande réforme procédurale de son histoire, dérivée de la promulgation de la Constitution de 2019, qui a consacré un chapitre entier à la réglementation de la Garantie des droits, qui dans son Article 94 établit les lignes directrices essentielles des procédures dans toutes les matières et, dans l'Article 95, celles spécifiques à la procédure pénale
Auteur: Juan Mendoza Diaz | internet@granma.cu

Cuba est confrontée à la plus grande réforme procédurale de son histoire, dérivée de la promulgation de la Constitution de 2019, qui a consacré un chapitre entier à la réglementation de la Garantie des droits, qui dans son Article 94 établit les lignes directrices essentielles des procédures dans toutes les matières et, dans l'Article 95, celles spécifiques à la procédure pénale.
La procédure régulière peut être un concept vide s’il ne contient pas les contenus nécessaires pour comprendre ce qu'il signifie, c’est-à-dire en détaillant les garanties qui le composent. La procédure régulière est donc un concept global, constitué d'un recueil ou catalogue de garanties.
Que sont les garanties ? Ce sont tous les instruments inscrits dans la Constitution et dans les lois qui assurent le respect des droits qui, dans le cas spécifique de la procédure pénale, comprennent tous ceux dont jouit le prévenu ou l'accusé.
Le prévenu est une personne qui fait l'objet d'une enquête pénale et qui a ce statut pendant toute la durée de la phase dont sont responsables les organes du ministère de l'Intérieur, sous le contrôle du Parquet. Il acquiert le statut d’accusé lorsque le Parquet établit un acte d'accusation à son encontre et la présente au tribunal compétent pour qu’il soit jugé.
Selon les spécialistes en la matière la seule façon de parvenir à un respect total des droits des accusés est de leur offrir les garanties nécessaires, afin d’empêcher que soient commises à leur encontre des actions violant la loi. Il appartient au droit procédural de respecter les garanties consacrées par la Constitution et toutes les autres qui, sans y être réglementées, sont indispensables à la sauvegarde des droits des prévenus et des accusés.
La Loi de procédure pénale, adoptée par l'Assemblée nationale du Pouvoir populaire le 28 octobre dernier, a permis de renforcer de façon substantielles les garanties des prévenus et des accusés. La Loi a développé les garanties contenues dans l'article 95 de la Constitution, et en a inclus beaucoup d'autres, qui sont le résultat du débat scientifique qui a eu lieu dans le pays ces dernières années, basé sur la recherche dans le domaine de la procédure pénale.
Contrairement à ce qui s'est passé lors de procès antérieurs, les législateurs cubains de la Loi de procédure pénale de 2021 ont ouvert un débat populaire sur le contenu des projets de Loi à soumettre à l'approbation de l'Assemblée, lesquels avaient été élaborés avec la participation de professeurs d'université et de chercheurs en sciences criminelles, qui ont apporté leurs points de vue sur les tendances les plus modernes opérant dans le monde en la matière.
La nouvelle Loi de procédure pénale tente de combiner les intérêts sociaux, visant l'élucidation et la poursuite des actes délictueux et le châtiment des auteurs, avec un respect adéquat des droits des prévenus et des accusés. Il s'agit d'une mission complexe à réaliser, car lorsqu'un citoyen est victime d'un acte criminel, il exige un procès rapide et une peine sévère, mais lorsqu'il s’agit de l’accusé, la personne, sa famille et ses amis exigent un procès avec toutes les garanties.
Une personnalité internationale dans ce domaine a décrit ce dilemme comme un nœud gordien, car toute l'histoire de la procédure pénale est une lutte pour parvenir à un équilibre entre la poursuite et le châtiment des coupables et la protection des innocents. Dans ce contexte, la nouvelle Loi de procédure pénale cubaine tente, même si ce n’est pas une tâche achevée, d'élargir la capacité des organes chargés d'enquêter sur les délits, mais aussi de renforcer la protection des droits et des garanties des personnes impliquées dans la procédure pénale.
La nouvelle Loi de procédure pénale a mis les poursuites pénales en conformité avec les principes universellement reconnus dans ce domaine. Conformément à cette aspiration, la norme juridique garantit une présence précoce de l'avocat dans le cours du procès.
Selon les dispositions de l'article 95 de la Constitution, qui établit le droit de toute personne à bénéficier de l'assistance d'un avocat dès le « début du procès », la Loi de procédure pénale garantit le droit d'être représenté par un avocat dès l’instant où la personne est convoquée pour être informé qu'il existe une accusation à son encontre, ce que l'on appelle « l'instruction des charges ». En vertu de la nouvelle Loi de procédure, la personne détenue doit être mise en accusation dans les 24 heures qui suivent sa privation de liberté et, à partir de ce moment, elle a le droit de désigner l'avocat de son choix et, si elle n'en a pas, elle peut exiger qu'il lui en soit commis un d'office, un service garanti dans tout le pays par l'Organisation nationale des cabinets d'avocats collectifs.
L'avocat commis d’office est obligatoire pendant toute la procédure d'enquête, lors des procédures susceptibles d'affecter les droits du prévenu et pendant le procès oral.
L'avocat de la défense assiste le prévenu au moment où il fait sa déclaration devant l’organe chargé des enquêtes du ministère de l'Intérieur. Auparavant, l'avocat a le droit de s'entretenir en privé avec son client et d'examiner au préalable les actions menées.
L'assistance d'un avocat de la défense pendant l'enquête permet au prévenu de connaître les droits que lui consacre la loi. Le rôle de l'avocat n'est pas d'inciter son client à mentir, mais de lui expliquer qu'il n'est pas obligé de déclarer sur certains aspects qui pourraient lui être préjudiciables, et que son silence ne peut pas être considéré comme une circonstance aggravante à son encontre. Il peut également l'informer qu’une coopération effective avec l'enquête peut être prise en compte dans certains délits, afin qu’il lui soit appliqué une issue alternative qui lui éviterait d'être traduit en justice. Il existe dans la Loi de procédure des accords de réparation entre les prévenus et les victimes, pour certains délits, qui peuvent améliorer la situation de l'accusé, un aspect dont l'avocat de la défense doit informer son client.
L'âge de la responsabilité pénale à Cuba est de 16 ans, et la nouvelle Loi offre un traitement spécial aux jeunes délinquants âgés de 16 à 18 ans, qui se voient garantir un avocat de la défense ou un avocat commis d'office, dans tous les cas, ainsi que la présence de leurs parents dans les actes d'enquête ou de justice.
Un élément important de la nouvelle procédure pénale cubaine est la possibilité de faire appel devant le tribunal de la mesure préventive de maintien en détention provisoire imposée par le procureur. Lorsqu'une personne est arrêtée et que les organes d'enquête considèrent qu'elle doit être maintenue en prison, une mesure qui doit être conditionnée par la gravité du délit commis et pour éviter que le prévenu tente de s'échapper ou d'accomplir certains actes qui pourraient entraver l'enquête. Cette procédure peut prendre jusqu'à sept jours, au terme desquels le Parquet doit prendre une décision motivée.
Dans la nouvelle loi, le prévenu a le droit de faire appel de cette décision devant le tribunal, ce qui permet d’effectuer une audience devant le juge pour évaluer la pertinence de la mesure imposée. Le juge peut maintenir la mesure de détention, la modifier en une mesure moins sévère ou laisser l'accusé en liberté. Lorsque le juge décide de changer la mesure pour une autre qui n'implique pas d'emprisonnement, le Parquet ne peut pas incarcérer de nouveau le prévenu, et s'il a l'intention de le faire, il doit le demander au tribunal,
Il convient de mentionner le traitement offert dans les procédures pénales aux peines alternatives, en vertu de ce que l'on appelle le « principe d'opportunité des poursuites ». Dans ce nouveau scénario, le Parquet peut se dispenser d'inculper une personne lorsque certaines circonstances sont réunies, comme le faible niveau de préjudice causé par l'acte, ou lorsque la personne qui a commis le délit est âgée de moins de 18 ans, et qu’il s’agit d’actes peu graves, entre autres cas établis par la loi.
Parmi les garanties, la Loi de procédure pénale offre au prévenu ou à l'accusé la possibilité de dénoncer l'existence de preuves obtenues illégalement, lesquelles doivent être retirées du dossier d'enquête, afin d'éviter que le tribunal chargé du procès oral ne puisse les voir et les évaluer, car les preuves obtenues en violation des garanties et des formalités du processus ne peuvent pas être utilisées au détriment de l'accusé.
Le procès oral, public et contradictoire, devant un tribunal composé de juges professionnels et de juges citoyens, appelés « legos » (juges non professionnels), est une autre garantie importante dans l'administration de la justice. Dans tous les cas, l’accusé en désaccord avec la sentence a le droit de faire appel devant une juridiction supérieure. Dans le cas des infractions allant jusqu'à huit ans de privation de liberté, qui sont jugées par les tribunaux municipaux, l'appel est traité par un tribunal provincial. Pour les infractions dépassant huit ans, la sentence peut faire l'objet d'un recours en cassation devant la Cour suprême.
Dans la nouvelle Loi, le pourvoi en cassation voit ses fondements élargis et permet à la Cour suprême de prendre connaissance et de statuer sur toute violation des droits et des garanties de l'accusé qui auraient été violés.
Les modèles procéduraux ne sont pas parfaits, car la possibilité de consacrer de plus en plus de droits et de garanties pour les prévenus et les accusés est une aspiration compréhensible, cependant, sur la base du résumé présenté ici, il est possible de répondre à la question en tête de cet article : à Cuba, il existe effectivement une procédure pénale régulière.
source : https://fr.granma.cu/cuba/2022-03-29/existe-t-il-une-procedure-penale-reguliere-a-cuba