France: Le secrétaire général de la FSM, G. Mavrikos, participe à la conférence agroalimentaire de la FSM-UISTAACT à Paris
07 Jun 2019
Le 7 juin, le camarade George Mavrikos, secrétaire général de la FSM, a participé à la Conférence agroalimentaire FSM-TUI à Paris sur le thème: « La qualité des produits agricoles et alimentaires, une responsabilité syndicale de classe ».
Lors de son discours, le cde George Mavrikos, secrétaire général de la FSM, a notamment souligné:
– La ferme solidarité de la FSM avec la classe ouvrière en France dans ses luttes. Il a soutenu les gilets rouges dans les lieux de travail.
– Il a dénoncé l’autoritarisme du gouvernement Macron et la violence de l’État, en qualifiant Macron de « marionnette des capitalistes, au service des monopoles ».
– Il a affirmé que la qualité des produits agricoles ne peut être améliorée que si l’exploitation capitaliste est abolie et que la terre devient une propriété sociale de ceux qui la travaillent, afin de mettre un terme au pillage des ressources naturelles de richesse.
– Il a appelé à la coordination et à l’action commune des travailleurs et des paysans pauvres et a souligné les efforts déployés par le PAME en Grèce et par nos affiliés au Mexique, en Inde et ailleurs.
– Il a condamné le rôle de l’OMC, du FMI et de l’OMS qui, par leur position et leurs politiques, favorisent la non-responsabilité des multinationales et les laissent incontrôlables pour leur permettre de produire des produits de qualité médiocre et inabordables.
– Il a critiqué les dirigeants de la CES et de la CSI, les qualifiant d’instruments de la Commission européenne et des mécanismes impérialistes internationaux.
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Ci-dessous, l’introduction principale de l’événement:
La question de la qualité des produits agricoles et alimentaires pose fondamentalement l’enjeu de l’accès à l’alimentation aujourd’hui pour 7,5 milliards d’êtres humains et demain pour 9 à 10 milliards. Elle ne peut être déconnectée des réalités et des évolutions de la mondialisation des systèmes alimentaires. Cette mondialisation que nous qualifions de capitaliste touche aux domaines essentiels de l’économie, du social, des problèmes environnementaux et
climatiques, de la culture, bien évidemment de la politique, de l’information, du scientifique et du juridique. Ainsi définies, les questions de la qualité des produits prennent une tout autre ampleur que l’on doit, pour en saisir les aspects fondamentaux, les réfléchir, les appréhender, les comprendre et les combattre, les aborder à partir de nos analyses de classe du syndicalisme. Les faits sont sans appel :
– Plus d’un milliard de personnes dans le monde souffrent de faim ou de malnutrition.
– Les 3/4 de ces personnes sont des paysans ou d’anciens paysans qui, chassés par la pauvreté, ont été condamnés à l’exode vers les bidonvilles des agglomérations urbaines ou parfois dans les camps de réfugiés.
– 2,8 milliards d’êtres humains vivent avec moins de 2 dollars par jour.
– Si 43 % de la population active mondiale est agricole, ce chiffre s’élève entre 60 et 70 % dans les pays du Sud en incluant le travail informel très lié au milieu rural et agricole.
– Soit 2,5 à 3 milliards de personnes qui vivent quasi exclusivement de l’agriculture.
– 4 % des plus grands propriétaires terriens contrôlent la moitié des terres cultivées.
– Dans 83 pays pauvres, 3 % des propriétaires fonciers possèdent ou contrôlent les quatre cinquièmes de la terre.
Ces réalités sont la conséquence du système capitaliste qui a fait de l’arme alimentaire une stratégie contre l’indépendance des peuples, qui a cassé les cultures vivrières pour les remplacer par des cultures d’exportation, surexploite les Hommes et les ressources naturelles détruisant la biodiversité, brevète le vivant interdisant aux paysans d’utiliser leurs semences, privatisant ainsi le patrimoine génétique mondial, s’accapare les terres, marchandise l’alimentation et bafoue le droit fondamental des peuples à se nourrir par l’assujettissement de l’agriculture aux lois du marché capitaliste.
Traiter de la question de la qualité des produits agricoles et alimentaires exige de poser les questions fondamentales de la place et du rôle de l’agriculture dans l’économie d’un pays, du type de développement agricole, de l’accès à la terre et à l’eau, de la souveraineté alimentaire, de l’organisation des paysans et des alliances, de la démocratie… en fait repenser notre système agricole et alimentaire pour l’extraire de la logique capitaliste de la rentabilité financière au bénéfice d’une infime minorité.
L’agriculture est encore, de loin, le secteur qui emploie le plus de personnes. Elle est donc une base essentielle du développement des pays pauvres, soit pour la moitié de l’humanité. La question que l’on doit se poser est celle-ci : ce développement agricole doit-il suivre la même voie que celle des puissances agricoles du Nord, notamment des Etats- Unis et de l’Europe occidentale ?
Pour en saisir toutes les données, il nous faut mesurer dans quel système mondialisé il se situe. Le fait dominant et essentiel, celui qui marque tous les processus en cours reste bien celui de la domination de quelques sociétés transnationales, d’une puissance mondiale jamais égalée. Si les Etats, les organismes institutionnels mondiaux, des organisations non-gouvernementales interviennent, parfois en apparence de façon autonome, fondamentalement les impulsions décisives sont imposées par les mastodontes du capitalisme. Que la Banque mondiale face un rapport sur l’avenir de l’agriculture, le but est clairement énoncé, il faut ouvrir largement l’agriculture et l’alimentation aux lois du marché. Toutes les dispositions de l’Omc leur sont favorables. Que la Fao abandonne toute référence aux réformes agraires progressistes, c’est pour privilégier et accompagner la montée en puissance des grands groupes capitalistes. Que Bill Gates avec sa fondation axe toutes ses orientations vers tel type d’alimentation, en l’occurrence le veganisme, c’est pour privilégier les capitaux financiers investis dans ces productions.
Les sociétés capitalistes dominant l’agroalimentaire mondial imposent leur rythme de restructuration, leur volonté d’accroître leurs profits, leurs objectifs de modeler les consommations et les circuits de production et de distribution.
LA CONSTRUCTION DES PUISSANCES AGRICOLES DU NORD EST-ELLE UNE VOIE À SUIVRE ?
Au Nord, une agriculture familiale moderne intégrée au capitalisme
L’agriculture familiale moderne ou l’entreprise agricole familiale dans les pays capitalistes développés comme aux Etats- Unis, dans l’Union européenne ou encore en Australie, est un segment indissociable de l’économie capitaliste dans laquelle elle est totalement intégrée. Concentration agraire, explosion du salariat, production agricole à des fins marchandes en sont des caractéristiques fortes. En capacité de nourrir le pays et de dégager des excédents exportables, elle a prouvé ses performances économiques commandées par la rentabilité financière et la recherche du profit maximum par l’exploitation des agriculteurs eux-mêmes et des salariés qu’ils emploient, et la surexploitation entrainant la détérioration des terres et des ressources naturelles.
Dans l’entreprise agricole de type capitaliste, l’autoconsommation ne compte
plus, elle tire sa légitimité de sa production pour le marché. Son efficacité tient à sa capacité d’absorption des innovations technologiques, à son équipement moderne. Elle concentre 90 % des tracteurs et autres équipements dont les agriculteurs sont propriétaires, fut-ce au prix de l’endettement. L’efficacité de l’entreprise agricole tient également au fait qu’elle exploite, en propriété ou en fermage, des superficies de bonnes terres correspondant aux moyens mécanisés.
Cette agriculture dite moderne est assujettie, voire complètement intégrée aux industries d’amont (engrais, semences, équipements) et d’aval (industries de transformation alimentaire et grande distribution). Elle fait souvent office de sous-traitant, pris en tenailles entre ces deux composantes de la chaîne de production, auxquelles s’ajoute le maillon financier avec les crédits accordés. Il s’agit là de l’affrontement classique entre divers types de capitaux et de l’extorsion de la rente foncière agricole.
Si l’exploitant agricole est un capitaliste par le fait qu’il est propriétaire des moyens de production et parfois de la terre, quand il est petit ou moyen agriculteur, il est également un travailleur de la terre lorsqu’il participe directement à la production. Sa plus- value lui est collectivement extorquée par les industriels et les financiers tout au long du processus de production.
Ce type d’agriculture est de moins en moins familial. Il peut prendre des formes diverses, notamment de grandes propriétés tenues par des capitaux de l’agrobusiness, de banques ou de firmes pouvant atteindre plusieurs dizaines de milliers d’ha avec peu de main d’œuvre salariée, ou des latifundia employant un nombre élevé de salariés. Leur rentabilité est obtenue au prix de dérives écologiques et environnementales, de gaspillage de terres et de conséquences sociales tout aussi effroyables subissant des salaires de misère et des conditions de travail extrêmement dégradées.
Dans ce cadre, il est nécessaire de clarifier nos approches de ce que l’on appelle aujourd’hui « chaîne globalisée de production ou de valeur ». Cette terminologie utilisée couramment et lancée par les chantres de l’idéologie dominante vise à faire croire que toutes les composantes de la chaîne créent de la valeur pour elle-même. Les processus de production seraient démocratisés. Quel leurre ! En fait, ces chaînes de production, au-delà de leur utilisation démagogique, confirme la volonté d’accaparer la valeur créée au bout de la chaîne c’est-à-dire par la société transnationale capitaliste qui la domine. L’exemple de la construction de la chaîne de valeur par le groupe Unilever est significatif. Les termes utilisés, les flux imposés sont tous orientés vers l’accroissement des profits et de la puissance d’Unilever. En tant que syndicalistes responsables, nous n’avons aucun intérêt à nous laisser piéger par de telles formulations, un tel vocabulaire, qui ont vocation à habiller l’exploitation forcenée des travailleurs de la terre et de nos industries. Laissons ce type d’arguments aux syndicalistes intégrés aux stratégies capitalistes.
Au Sud, des agricultures paysannes pauvres intégrées dans le capitalisme local et mondial.
Les agricultures paysannes du Sud rassemblent 3 milliards d’êtres humains, soit près de la moitié de l’humanité. Elles se partagent entre celles qui ont bénéficié de la « révolution verte », avec l’apport d’engrais, pesticides et semences, mais peu motorisées et les autres. Les gains de productivité obtenus par les premières ont dépassé ceux des autres secteurs d’activité, entrainant une réduction des prix agricoles.
Mais globalement, l’autoconsommation, seul moyen de survie pour les populations rurales concernées, reste importante. Les agricultures paysannes, non équipées en
matériels, souvent micro fundiaires en termes de superficie des exploitations sont violemment concurrencées par le capitalisme agraire. Elles sont en incapacité d’approvisionner les villes. Elles sont néanmoins intégrées dans le système capitaliste à la mesure de leurs contributions au marché en termes d’intrants (engrais et semences) et d’approvisionnement des firmes de transformation et de commercialisation.
Dans ce cadre, nous assistons aujourd’hui à d’autres développements de ce type de « révolution verte », qui sous-tendent avant tout la dépendance et la domination par la technologie et les sciences, intégrant toujours plus l’agriculture aux choix et orientations du capitalisme. Ce processus permet une domination plus forte encore de l’impérialisme yankee qui conforte la puissance de toutes les transnationales à base nord-américaine.
La modernisation des agricultures du Sud par la « voie capitaliste » est-elle possible et souhaitable ?
Si l’on imagine un développement de ces agricultures semblable au parcours suivi par les puissances agricoles du Nord, quel résultat cela peut-il donner ?
L’exode rural et le passage de l’activité agricole vers d’autres secteurs économiques en milieu rural et urbain sont des constantes de l’histoire des pays capitalistes développés. Prenons l’exemple de la France. La part de la population active agricole française était de 55 % à la fin du XIXème siècle, encore de 30 % au lendemain de la deuxième guerre mondiale. Aujourd’hui, elle représente 3 %. Toutefois, l’agriculture et l’alimentation induisent des centaines de milliers d’emplois dans les secteurs d’activités d’amont et d’aval, et les services qui leur sont liés, représentant ainsi pour la France près de 15 % de la population active. A l’opposé d’une place restreinte au sens strict de l’emploi direct agricole, ce chiffre montre l’importance économique et sociale de ces secteurs agricoles, alimentaires et forestiers.
Ces évolutions, qui ont accompagné la domination des lois du marché en agriculture, se sont produites dans le même temps où, au niveau de la planète, le commerce international des produits agricoles et alimentaires a été multiplié par 7 en 50 ans, ce qui représente bien la dépendance croissante de nos secteurs aux lois du commerce capitaliste international et de la transformation généralisée des produits agricoles. Elles s’inscrivent d’ailleurs aussi dans cette autre dénomination que le capitalisme voudrait nous imposer « le mangeur glocalisé ». En fait, les êtres humains mangeraient de façon plus globale, mais adaptée aux réalités locales. Quand on sait le nombre de ceux qui souffrent de malnutrition et de faim, de tels termes concourent aux leurres de l’idéologie dominante. Comme d’ailleurs celui d’émergence des « couches moyennes » qui pousseraient à l’uniformisation alimentaire ou de « société civile globalisée » qui voudrait nous faire croire à une démocratisation en marche de la mondialisation. Les réalités de
l’affrontement de classe à tous les niveaux nous imposent de démasquer de tes discours qui cachent l’enfoncement dans la misère et l’exclusion de milliards d’êtres humains.
Plusieurs facteurs importants ontinfluencé ce processus d’exode rural et agricole. Les grandes lois d’orientation agricole de 1960-62 ont notamment mis en place des structures du développement agricole mobilisant les agriculteurs, le remembrement des exploitations pour
permettre qu’un agriculteur et sa famille puisse vivre du travail de l’exploitation. La banque privée constituée autour des agriculteurs, le Crédit Agricole, a grandement contribué par un crédit peu cher pour accompagner la modernisation et l’achat de matériel. La recherche agronomique publique a joué un rôle important pour la mise à disposition de semences variétales sélectionnées pour des hauts rendements. Les formations initiale et continue ont permis l’élévation des
compétences professionnelles des agriculteurs qui ont mené la modernisation de l’agriculture. Ce qui a signifié un développement sélectif, destructeur et centré vers les plus performants. Le système de subvention et de garantie de prix de la Politique agricole commune et une croissance forte en création d’emplois pendant plusieurs décennies hors de l’agriculture, ce qu’on a appelé la période des « Trente Glorieuses », notamment dans l’industrie jusque dans les années 70, ont absorbé une part importante des pertes d’emplois et de la disparition des petits paysans et façonné notre agriculture nationale. Ces bouleversements ne se sont pas faits sans heurts. Il y avait plus de 6 millions d’agriculteurs en 1955. Ces paysans ont été contraints de quitter l’agriculture. L’industrie et les services ont, à la fois, absorbé cette main-d’œuvre et l’ont aspirée par leur développement. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 450 000 sur des exploitations dites professionnelles, très spécialisées, tournées vers le marché. Cette situation caractérise une agriculture française entrée pleinement dans sa mutation capitaliste, bien qu’une partie des agriculteurs y résiste encore.
Dans l’optique capitaliste et impérialiste, l’application mécanique de ce schéma et l’orientation capitaliste donnée à l’agriculture viseraient à ce qu’une cinquantaine de millions d’agrobusiness men ou des grandes firmes, assurent la sécurité alimentaire de la planète, disposant des moyens financiers et équipements modernes, des superficies importantes de terre enlevées aux agricultures paysannes, dotées des meilleurs sols, utilisant à fond pesticides et phytosanitaires, et qui seraient en capacité de produire l’essentiel de ce que les consommateurs solvables achètent encore à la production paysanne et accompagnant une standardisation des produits alimentaires et donc une baisse des qualités.
Ce système s’inscrit à merveille dans la primauté accordée au « big-data ». Les firmes agroalimentaires maîtrisent ainsi les évolutions de la consommation alimentaire d’un côté et de l’autre s’accapareraient définitivement la domination de la production agricole. Dans ce sens, nous devons bien apprécier l’état de concentration atteint dans le système agricole et alimentaire mondial. A un bout 600 millions de producteurs agricoles, au bas mot 2,5 à 3 milliards d’êtres humains vivant directement de l’agriculture, à l’autre bout 7 milliards de consommateurs. Entre les deux, une concentration capitaliste d’une puissance mondiale excessivement dangereuse pour l’humanité, les 10 plus grandes entreprises de leur secteur dominent 75 % de la production de services, 90 % dans l’agrochimie, 95 % du négoce des céréales, 30 % de la distribution ou de la transformation alimentaire. De quoi comprendre les dominations actuelles et la place de la qualité des produits dans cette domination. La mondialisationd’aujourd’hui se fait via les flux renforcés de production et de commercialisation et une concentration capitaliste de plus en plus prégnante.
Que deviendraient les milliards de ces producteurs paysans non compétitifs ? Que deviendraient ces milliards d’êtres humains, déjà pour la plupart pauvres parmi les pauvres, mais qui arrivent à se nourrir tant bien que mal, plutôt mal pour une grande partie d’entre eux ? Aujourd’hui, à l’échelle mondiale, les progrès scientifiques et technologiques permettent de réaliser des gains de productivité considérables dans l’industrie et les services. Celles-ci ne sont plus en capacité d’absorber dans les mêmes proportions qu’il y a 40 ans, une main- d’œuvre importante. Aucun développement industriel, même avec des taux de croissance élevés, et on en est bien loin, ne serait en mesure d’absorber ce « surplus » de main d’œuvre. Les vagues d’immigration de populations pauvres vers de soi-disant paradis qui sont de fait de véritables enfers, sont une des conséquences de ces orientations capitalistes de pillage et de destruction.
C’est dire que le capitalisme est par nature incapable de résoudre la question de l’accès à une alimentation saine et de qualité pour tous dans le respect de la souveraineté alimentaire et de la sauvegarde des ressources naturelles et que les seules perspectives qu’il offre, ce sont celles d’une planète de bidonvilles et de milliards d’êtres humains en « trop », marginalisés, exclus de tout.
Concentration et accaparement des terres
L’approfondissement de la crise du capitalisme est arrivé à un point où le système doit trouver de nouveaux terrains d’exploitation, soit la modernisation de la production agricole et l’exploitation plus poussée des ressources naturelles encore en dehors de sa domination complète, commandées notamment par les intérêts de l’agrobusiness. Cette phase est déjà engagée. Selon une étude du Cirad, organisme français de recherche agronomique et de coopération internationale pour le développement durable des régions tropicales et méditerranéennes, 200 millions d’ha ont fait l’objet de transactions foncières ou en d’autres termes d’accaparement des terres, dans le monde entre 2000 et 2010, soit 8 fois la taille du Royaume-Uni. L’Afrique est le principal continent concerné et les firmes transnationales états-uniennes, de loin le premier investisseur. Si cet accaparement de terres est destiné à produire des cultures de rentes comme les céréales, les agrocarburants, il vise également les exploitations minières, le tourisme, l’industrie manufacturière et la sylviculture.
Ce marchandage des terres par des capitaux financiers conduit à une concentration agraire à grande échelle, une mise en cause des indépendances nationales et de la souveraineté alimentaire des populations au profit de l’agrobusiness et d’un type de développement capitaliste des agricultures.
On en revient au système des « enclosures » à l’échelle mondiale, pour faire référence à Marx et Engels lorsqu’ils analyseront le mouvement des enclosures en Angleterre au XVIème siècle, mouvement qui a modifié les champs ouverts et pâturages communs cultivés par la communauté en un système de propriétés privées entre les mains de riches propriétaires fonciers, dépossédant les paysans qui en vivaient.
Samir Amin, économiste égyptien, a très bien décrit cette nouvelle phase du capitalisme. Je le cite : « J’en conclus que le capitalisme est entré dans sa phase sénile descendante ; la logique qui commande ce système n’étant plus en mesure d’assurer la simple survie de la moitié de l’humanité. Le capitalisme devient barbarie, invite directement au génocide. Il est nécessaire plus que jamais de lui substituer d’autres logiques de développement, d’une rationalité supérieure. »
LE MAINTIEN ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’AGRICULTURE PAYSANNE, CONDITION DU DÉVELOPPEMENT
La construction de sociétés socialistes appelle au dépassement du capitalisme et à la mise en œuvre d’alternatives ouvrant la voie à la construction du socialisme dans les conditions propres de chaque pays.
2,5 à 3 milliards de personnes dans le monde vivent quasi exclusivement de l’agriculture. Aussi, l’avenir de ces populations et de l’humanité passe-t-il obligatoirement par une réponse démocratique des populations aux lourdes exigences agraires et au développement des agricultures paysannes.
Nous devons nous opposer fermement à toutes les constructions économiques qui valorisent les partenariats public-privé qui ne signifient qu’une mise sous tutelle des investissements publics au profit des intérêts privés. Il en va d’ailleurs de même avec les accords dit de coopération qui s’élaborent aujourd’hui sous l’égide de l’impérialisme américain ou européen et
qui font les choux gras des rencontres bilatérales du type G20, rencontres qui se spécialisent dans différents domaines dont la production agricole et alimentaire.
S’il n’existe pas de solutions toutes faites, le maintien et le développement des agricultures paysannes passent par de grandes orientations fondamentales dont nous citerons quelques dimensions essentielles.
Le droit à la souveraineté alimentaire pour tous les peuples
La place occupée par la population active vivant quasi exclusivement de l’agriculture paysanne fait de celle-ci la base incontournable du développement dans de nombreux pays. Soutenue par des politiques publiques, l’agriculture paysanne doit assurer l’indispensable souveraineté alimentaire de chaque pays, neutralisant l’arme alimentaire de l’impérialisme. Elle doit assurer travail et bien-être.
La dette des pays du Sud, stratégie de l’impérialisme pour asseoir sa domination au moment des mouvements
d’indépendance et soutenue par les bourgeoisies nationales, est un véritable pillage des peuples depuis plus de 50 ans. Elle annihile toute possibilité de développement. Afin d’assurer sa domination, l’impérialisme et ses instruments, le FMI et la Banque mondiale, ont imposé des plans
d’ajustement structurel. Ces plans se sont traduits par la reprivatisation des terres remettant en cause les réformes agraires là où elles avaient pu se développer, la réduction drastique des dépenses publiques de santé, d’éducation,
d’infrastructures…, la privatisation des services et des entreprises publiques jugées rentables, notamment les offices de commercialisation des produits agricoles. Les cultures vivrières ont laissé la place aux cultures d’exportation, les agricultures ont été livrées au marché mondial. Les agricultures paysannes se sont paupérisées au point de fournir la majeure partie du contingent mondial des pauvres et souvent des migrants. La dette maintient ces pays sous la coupe de l’impérialisme et entraîne une perte de souveraineté alimentaire. Cette dette illégitime doit être annulée. Ce pillage financier des peuples se conjugue à une financiarisation accélérée du système agricole et alimentaire mondial sous l’égide de la Banque mondiale, bénéfique avant tout pour le capital financier.
L’alimentation est vitale pour les populations. Elle doit être l’affaire des peuples. L’Etat national par et pour les peuples et les travailleurs doit mettre en œuvre des politiques agricoles et alimentaires nationales garantissant la réponse aux besoins alimentaires de toutes et tous, en quantité et en qualité, incluant la défense des traditions alimentaires nationales. Ces politiques publiques doivent privilégier l’agriculture paysanne intensive en emplois, sauvegardant les ressources naturelles, l’environnement et la biodiversité, permettant la valorisation des potentiels et capacités agricoles nationaux.
La brevetabilité du vivant est un moyen supplémentaire de domination du capitalisme. Les innovations agricoles et alimentaires sont nombreuses, certaines dangereuses comme la prolifération d’organismes génétiquement modifiés ou le développement des agrocarburants. Nous devons intégrer dans nos combats des revendications s’opposant à de telles politiques et productions dominées par la soif de profits capitalistes et avancer nos propres propositions répondant aux besoins des populations, protégeant l’environnement, combattant le
réchauffement climatique.
Les accords de libre-échange, les accords de partenariat économique qui se sont substitués aux accords de Lomé, mettent en concurrence les agricultures du monde avec des différentiels de productivité tels que les agricultures paysannes sont laminées par les grandes firmes et l’agrobusiness. L’agriculture et
¡’alimentation doivent sortir des négociations de l’OMC et des accords de libre-échange. Chaque pays doit avoir le droit de protéger l’agriculture paysanne par un soutien économique et social, notamment en garantissant des prix rémunérateurs aux producteurs agricoles et en subventionnant les produits alimentaires de première nécessité pour répondre aux besoins populaires. Ce soutien passe nécessairement par des protections aux frontières. Aux niveaux nationaux et régionaux, des politiques de régulation, singulières, adaptées aux conditions locales doivent protéger la production nationale. Ces régulations peuvent passer par des accords inter régionaux répondant aux exigences d’un développement qui intègre et non qui exclut ou élimine.
De telles mesures contribueraient à la construction d’un nouvel ordre économique international ouvrant à de nouvelles coopérations mutuellement avantageuses, solidaires, dans le respect des indépendances de chaque peuple.
L’accès à la terre et aux moyens de production
L’accès à la terre est un axe essentiel pour maintenir et développer l’agriculture paysanne. La question de la terre est vitale pour la moitié de l’humanité. Tous les paysans et agriculteurs de la planète sont confrontés à une stratégie agressive du capital. L’accaparement des terres ouvre un champ nouveau aux intérêts du capital financier et de l’agrobusiness. Dans ce sens, les institutions internationales, telles l’OMC et la Banque mondiale poussent à des « réformes du système foncier » ou encore à des « réformes agraires assistées par le marché » qui ne sont rien d’autres que l’accélération de la privatisation des terres nécessaires à l’expansion du capital. Des réformes agraires ont été mises en œuvre au cours du XXème siècle dans différents pays. Elles ont connu divers destins. Très partielles, en Amérique latine, ne remettant pas en cause la domination des propriétaires terriens et des latifundia, ou en Afrique, brisée y compris par l’assassinat notamment de Thomas Sankara au Burkina Faso, aux kolkhoz et sovkhoz de l’ère soviétique, en passant par le Vietnam ou la Chine où elles ont eu des effets positifs. Ces réformes ont toutes été à l’origine des revendications des masses paysannes. Elles n’ont pas été linéaires, mais faites de tâtonnements, de retour aux petites exploitations…, mais l’axe central a été une appropriation collective de la terre et son exploitation collective, y compris dans la dimension des moyens de la travailler, pour mettre en œuvre une revendication ancienne « la terre à ceux qui la travaillent ».
Nous pensons qu’il s’agit là d’une question centrale dans la constitution de systèmes agro-écologiques s’inscrivant dans les réalités de chaque pays, tant en terme alimentaire que sanitaire ou environnemental. Eléments constitutifs d’alternatives démocratiques et progressistes, ils peuvent répondre pour une part essentielle aux défis fondamentaux qui sont posés aux niveaux national et mondial.
Une réforme agraire progressiste qui développe des dimensions révolutionnaires peut contribuer à l’abolition de la propriété privée du sol. La terre, bien public commun s’il en est, ne doit plus être traitée comme une marchandise ordinaire. Nous sommes là au cœur des enjeux de classe autour des notions de biens communs. Pour nous, il ne s’agit pas de valeurs subjectives plus ou moins teintées d’humanisme petit-bourgeois et de sentimentalisme. Il s’agit de dimensions très concrètes sur lesquelles les peuples ne conquerront des avancées que dans des luttes de classe âpres et fortes. Les peuples indigènes d’Amérique latine parlent de la « Terre-mère », Pachamama, incarnant l’interaction entre la nature et l’être humain, de sorte que le déséquilibre de l’un de ces aspects influe sur tout et tout le monde. Les luttes pour la réforme agraire et contre l’oppression des peuples indigènes se sont souvent confondues. Ce qui explique sans doute l’importance du mouvement des sans-terre.
Tous les paysans doivent avoir un accès égal à la terre. Cette construction passe par la double affirmation des droits de l’Etat du peuple, seul propriétaire, et de la famille paysanne pour le seul usage de la culture ou de l’élevage, propre à la reproduction de l’exploitation et à la consommation alimentaire locale et nationale. Elle doit être fondée sur la mobilisation des travailleurs de la terre dans leur ensemble, paysans moyens et pauvres, sans terre et salariés agricoles. Une réforme agraire progressiste doit s’accompagner de la mise à disposition des moyens de production et de transformation. Elle peut également s’étendre à leur utilisation collective pour une plus grande efficacité, la création de petits ateliers de transformation alimentaire.
Constante de l’histoire, la gestion de l’eau a toujours été l’objet de choix stratégiques fondamentaux. Au cœur de nombreux conflits, l’eau constitue un enjeu politique de domination. La reconnaissance par l’impérialisme américain de la domination israélienne sur le Golan est un exemple significatif de ces objectifs réactionnaires. L’engagement de la puissance publique est une exigence, notamment du fait de son caractère vital et de l’importance des capitaux nécessaires aux infrastructures. L’accès à l’eau doit être partie intégrante des politiques publiques de développement de l’agriculture paysanne. Ressource naturelle, elle est bien commun de l’humanité. Elle ne peut être gérée comme un bien marchand soumis à la rentabilité financière et à la recherche de profits. Son assainissement doit être une priorité politique.
DES EXIGENCES SOCIALES
L’organisation des travailleurs de la terre
L’importance de la population active agricole dans les pays du Sud notamment, mais aussi dans les pays capitalistes dominants, et la nécessité de mettre en œuvre des alternatives à l’agriculture capitaliste dont les dégâts au niveau social, économique et environnemental ne sont plus à démontrer, place au cœur de la réflexion le type de développement agricole, les modes de production et l’organisation des travailleurs de la terre.
La modernisation à marche forcée des agricultures du Sud sur le modèle des agricultures des pays capitalistes développés et la poursuite de ce modèle dans les pays capitalistes sont un crime contre l’humanité, nous entrainant vers une catastrophe sociale, économique et environnementale. Le choix du système agricole et alimentaire et de son organisation à promouvoir est donc essentiel.
Les anthropologues ont démontré par de multiples études que l’agriculture paysanne est, à notre époque, économiquement et socialement le meilleur système d’organisation. L’agriculture familiale paysanne est en mesure de stimuler l’usage intensif du sol, mobilise ses réserves de main-d’œuvre familiale, assure une haute productivité des investissements, bénéficie d’une
connaissance fine du milieu naturel, privilégie la diversification contre la rigidité de la spécialisation et se soucie de qualité, puisqu’elle consomme, pour partie, ce qu’elle produit.
L’organisation paysanne est un apport structurel indispensable. Elle tire sa justification et sa légitimité d’enjeux qui relèvent du plein emploi et de la fourniture de nourriture, élément vital pour les populations, au niveau mondial. L’organisation des paysans doit permettre de mieux maîtriser leur propre développement, de mutualiser ressources, savoir-faire et compétences, de valoriser leur production. Elle peut être également un moyen de mobiliser les ressources financières, sous forme de coopérative de financement. Elle est une forme d’organisation d’autant plus proche des
populations agricoles qu’elle est construite par eux.
Les coopératives sont une forme d’organisation collective efficace en agriculture dans tous les pays. Ancrée territorialement, elle permet, à un niveau géographique déterminé par les paysans eux-mêmes, au niveau d’un village ou d’une communauté, de mettre en commun les ressources, les savoir-faire et les débouchés.
La mise en place de coopératives ouvre au développement de complémentarités entre l’amont et l’aval, avec par exemple la transformation des produits agricoles en denrées alimentaires de qualité. La coopérative peut favoriser les commerces de proximité ou encore des ateliers artisanaux, voire de petites industries, pour la petite mécanique fournissant les paysans. Elle permet aussi d’organiser les circuits de commercialisation, notamment l’acheminement des productions vers les centres de consommation.
La forme coopérative permet d’intégrer l’ensemble des activités proches de l’agriculture. Forme d’organisation collective, elle est source de dynamisme et de responsabilisation, de maîtrise de leur développement par les travailleurs de la terre. Elle est d’autant plus source de progrès que chacun participe à sa construction, en étant partie prenante des décisions, de l’activité et des résultats.
La question de la réappropriation par les peuples et leurs Etats des sciences et des recherches fondamentales et appliquées est fondamentale en agriculture et pour l’alimentation. Aujourd’hui les sciences dans nos domaines sont intégrées et par ce fait sous domination capitaliste. Pour ne prendre qu’un exemple le budget mondial du groupe Nestlé en recherche et développement se situe à 2,3 milliards de dollars, soit quatre fois plus que les budgets de recherche d’Etats importants, sans tenir compte du pillage que cette société transnationale réalise sur les budgets publics de recherche. Comment peut-on imaginer que ce groupe promotionne les sciences et des recherches au service des populations. De par nature, le capitalisme est anarchique et égoïste. Le groupe privilégie les recherches scientifiques et les évolutions technologiques qui favorisent
l’accroissement de ses profits. Ce sont ces logiques qu’il nous faut combattre et remettre sur leurs pieds au service des peuples, de l’humanité, de l’avenir de notre planète.
La question de la démocratie constitue un axe essentiel pour la conception et la mise en œuvre de politiques de maintien et de développement de l’agriculture paysanne tout au long des processus et dans chacun des domaines.
Le poids de la population active agricole impose de l’impliquer pleinement. Les organisations syndicales des paysans, les organisations syndicales d’ouvriers agricoles et plus globalement des travailleurs agricoles et ruraux, sont une force indéniable pour imposer des avancées progressistes en matière de politique agricole, au niveau national ou régional. Si elles ne peuvent être en capacité de prendre à leur charge la conception et la mise en place d’une politique agricole (avec tout ce qui l’accompagne en matière de politiques publiques et d’investissements), elles
peuvent jouer le rôle essentiel dans l’expression des intérêts des paysans et travailleurs de ce secteur auprès de la puissance publique. C’est avec leur expression et leur participation aux décisions que des avancées progressistes pourront être obtenues.
La place et le rôle des femmes dans l’ensemble de ces questions constituent une dimension majeure. On le voit en Afrique, les femmes sont bien souvent à la tête de la ferme tandis que l’homme travaille (ou en cherche) en ville, voire à l’étranger. Elles donnent consistance à la vie du village, à sa stabilité. Plus généralement, « l’exploitation familiale » paysanne fait référence à la famille, laquelle est caractérisée jusqu’à ce jour et presque partout par des structures qui imposent la soumission des femmes et la surexploitation de leur force de travail. La transformation démocratique ne se fera pas dans ces conditions sans mouvements organisés des femmes concernées.
La réforme agraire est une dimension essentielle d’un nouvel État construisant le socialisme, qui ne sera jamais que l’organisation de la classe dominante et dans ce cas précis de l’alliance ouvriers et paysans. Or, les ouvriers agricoles, la classe qui a le plus de mal à s’organiser, ne doivent pas laisser se réorganiser leur vie et leurs conditions de travail sans qu’ils n’aient leur mot à dire. Et pour faire valoir leurs propres intérêts de classe, ils ne peuvent s’en remettre qu’à eux-mêmes. « Et le premier pas dans ce sens, c’est ¡’organisation de classe autonome du prolétariat rural ».
Faire triompher une réforme agraire progressiste et révolutionnaire au sens large, soit donner « la terre à ceux qui la travaillent » et organiser collectivement les moyens de production, nécessite à l’heure actuelle une alliance des classes dominées, celles des paysans moyens et pauvres, sans terre, et des travailleurs agricoles et ruraux, partie intégrante de la classe ouvrière.
Des industries alimentaires extraites du carcan capitaliste
L’alimentation doit être considérée comme un bien public, comme nous l’entendons, parce que l’accès à une alimentation saine et diverse est le fondement de la santé publique et sociale de la population au niveau national comme au niveau mondial. Secteur stratégique et vital pour l’économie nationale et les populations, l’alimentation doit être extraite du carcan capitaliste de la rentabilité financière.
Les grandes entreprises bloquent les évolutions exigées par l’humanité. Le caractère privé des groupes engendre une exploitation féroce des salariés dans une course aux profits et aux dividendes pour les actionnaires. Cette logique est en contradiction avec l’investissement et le développement du potentiel industriel, avec les évolutions techniques et de nouvelles découvertes annihilées parce que jugées non rentables. La qualité des produits et leur contrôle, enjeu de santé publique, ne peuvent être laissés entre les mains d’intérêts égoïstes. Les dirigeants du capital dominant de nos professions agricoles et alimentaires se gargarisent de la notion de « responsabilité sociale des entreprises ». Dans le même temps, elles licencient à tour de bras, ferment des unités de production, abandonnent des pans entiers de nos économies, poussent des centaines de millions de familles au chômage et à la misère. Nous devons combattre de tels slogans qui n’ont qu’une valeur publicitaire. Dans le même temps, ces mêmes entreprises édictent à travers le monde des normes de production d’ordre privées qu’elles imposent à toutes les entreprises, notamment moyennes et petites, coopératives ou publiques, qui n’ont pas les moyens de les réaliser. Ainsi, elles accroissent leur monopolisation de secteurs alimentaires entiers faisant fi de la notion de concurrence. Elles reçoivent, pour réaliser de tels objectifs, l’appui d’Etats à leur solde. Quel avenir le capital nous réserve-t-il ? Le capitalisme fait la démonstration qu’il n’ouvre aucune perspective à l’humanité, n’est en mesure de répondre à aucun des défis fondamentaux posés à nos secteurs agricoles et alimentaires.
L’avenir de nos industries agroalimentaires, ce sont les salariés, ensemble avec la totalité de la classe ouvrière. Ce sont les seuls à pouvoir représenter les intérêts de la Nation. Les intérêts immédiats des salariés, l’emploi, les salaires, leur santé et leurs conditions de vie et de travail, une alimentation saine et équilibrée, accessible à tous, rejoignent ceux de l’immense majorité de la population, expriment également ceux de la Nation. Ils ont des convergences objectives avec la grande majorité des petits et moyens agriculteurs qui subissent
la loi des industriels agroalimentaires et de la grande distribution.
À l’appropriation par quelques-uns des richesses nationales et à leur bradage, on doit répondre par la primauté des intérêts des salariés et du pays. L’appropriation collective des moyens de production pour sauvegarder l’emploi industriel et la souveraineté alimentaire nationale est au cœur de nos combats.
L’alimentation comme l’eau sont d’une telle importance pour la vie qu’il faut briser le carcan de la propriété privée et de la domination impérialiste. Les grandes entreprises stratégiques doivent être nationalisées de façon démocratique en donnant le pouvoir de décision aux travailleurs. La propriété capitaliste entre en opposition frontale avec le processus de socialisation croissante de l’économie dû aux avancées scientifiques et technologiques, à la complexité et aux interdépendances multiples, à
l’engagement public de plus en plus prégnant.
Les salariés doivent s’approprier les moyens de production pour garantir une alimentation saine et équilibrée. Ainsi seront assurées la défense du potentiel agricole et alimentaire national, notre souveraineté alimentaire pour garantir l’indépendance du pays. Les agriculteurs, les consommateurs et les élus locaux et nationaux doivent y contribuer. Une véritable nationalisation exige une intervention autogestionnaire des salariés pour imposer des critères d’efficacité économique et sociale pour la satisfaction des besoins, pour créer les conditions d’une croissance nouvelle ayant pour finalité le développement et l’épanouissement de la population.
Dans ce sens, les combats syndicaux sont essentiels. Ils se conjuguent à nos combats pour la paix, le désarmement et la solidarité active et militante, l’internationalisme.
Nous nous opposons à la domination impérialiste de quelques pays qui veulent régenter le monde, en tout premier lieu les Etats-Unis.
Les attaques répétées et incessantes contre l’indépendance nationale et le multilatéralisme en sont des démonstrations. Dans le système mondial agricole et alimentaire, nous avons également un besoin urgent de multilatéralisme pour faire front aux diktats impérialistes.
Le besoin d’un syndicalisme de classe qui refuse l’assujettissement et l’accompagnement social des stratégies patronales et de leurs valets s’exprime avec toujours plus de force et d’exigence.
Comme l’a proclamé K. Marx, le mouvement syndical, tant au niveau national que régional et mondial doit combattre pour les revendications immédiates des travailleurs et des peuples et contribuer à la construction de sociétés libérées de l’exploitation de l’homme par l’homme.
Il doit s’extraire de la collaboration de classe qui est une impasse sociale, économique, politique et culturelle pour les classes travailleuses de tous les pays. Nos organisations syndicales, au niveau de leurs responsabilités nationales, professionnelles et internationales respectives, s’y inscrivent avec détermination.