Vu de l'intérieur: 3 questions à Charlotte Balavoine conseillère politique au Parlement européen
Publié le 03/05/2019.
Conseillère politique au sein du groupe GUE/NGL depuis près de 10 ans, Charlotte connaît les luttes politiques de l'intérieur de l'institution.
Elle répond à nos questions et nous montre comment des députés communistes peuvent être utiles pour porter nos aspirations!
Des députés communistes, au Parlement européen, ils peuvent vraiment gagner des choses?
Nous sommes confrontés à des institutions profondément anti-démocratiques. Celles-ci entretiennent sciemment l'opacité afin d’empêcher au maximum aux peuples de s’immiscer dans le débat public. Dans ce cadre nos élus ont quatre rôles majeurs :
– Être les porte-paroles du mouvement social en faisant rentrer jusque dans l’hémicycle la voix des travailleurs et des luttes. C'est ce que Marie-Pierre-Vieu fait sur le « paquet mobilité » c'est à dire les conditions de travail des routiers dernièrement.
– Être les lanceurs d'alertes des directives et politiques en préparation afin d'en informer en amont les populations et les inscrire dans le débat public. C'est ce qu'à pu faire Patrick Le Hyaric sur le grand marché transatlantique,
– Pousser les contradictions du système néolibéral aujourd'hui incapable de régler la crise qu'il a lui-même généré. C'est le cas sur les questions d’évasion fiscale par exemple, ou plus de 1 000 milliards d'euros qui sont perdus chaque année au niveau de l'UE et ou on continue de nous dire « qu'il n'y a pas de paradis fiscal au sein de l'UE ».
– Construire le rapport de force au niveau européen en travaillant au quotidien avec les forces communistes et progressistes mais également avec les forces sociales et associatives afin de construire une résistance et une alternative face à cette Europe de l'argent et du grand Capital.
Enfin on le sait, les députés communistes ne font pas que « défendre de Bruxelles », ou par le travail institutionnel les travailleurs, mais ils sont au quotidien à leur cotés afin d'être utiles aux populations, ramener le travail théorique à la réalité du terrain et aider à construire les mobilisations. C'est donc un pieds dans la rue et un pied dans les institutions que se construit leur mandat. Ce n'est que comme ça que nous pouvons mettre en échec certaines politiques comme les directives de libéralisation des Ports en 2003 et 2006. Plus récemment, il nous aura manqué 17 voix pour proposer une alternative beaucoup plus progressiste sur la question du détachement des travailleurs routiers.
L'extrême droite, en France, ils avancent souvent des propositions "sociales", mais dans les faits, ils font quoi au Parlement européen?
En France, comme au niveau européen, l’extrême droite nous montre un « vernis social » lorsqu'en réalité...elle défend des politiques ultralibérales mais encore plus nationalistes et xénophobes que celles de l'UE. En effet, que ce soit lorsque Marine Le Pen s'oppose à l'augmentation du SMIC en France, ou que les députés RN vote la directive « secret des affaires » au Parlement Européen. Ce sont toujours les mêmes qui sont protégés et les même qui payent...Dans d'autres pays dirigés par l’extrême droite (Italie, Autriche, Hongrie, Pologne et jusqu'au mois dernier la Belgique), ce sont toujours sur les politiques anti-sociales et ultra-libérales que l'on trouve le point d'accord avec la Commission Européenne. Le grand exemple aura sans doute été la comédie jouée par le gouvernement italien avec Bruxelles sur leur budget. Après avoir menacé de rompre avec l'UE si la Commission refusait le budget, ils se sont finalement mis d'accord sur...les privatisations !
L’extrême droite à donc le même rôle qu'hier : détourner la colère légitime contre les institutions européennes et les gouvernants pour diviser les travailleurs et ne surtout pas construire d'alternative au système.
Le vote aura lieu dans quatre semaines.....avec ton expérience, quels sont les quatre arguments majeurs pour voter pour la liste conduite par Ian Brossat?
La première chose c'est que pour moi il ne s'agit pas uniquement de dire « on va défendre les travailleurs » mais de joindre la parole aux actes. Avec une liste composée à plus de 50% d'ouvriers et d'employés, le PCF présente la seule liste représentative de la société française. Il faut faire rentrer le monde du travail au Parlement Européen pour bousculer les choses !
De la même façon, et c'est une caractéristique des élus communistes : en votant pour les élus PCF vous voterez pour des élus qui ne se serviront pas de leur mandat pour s'enrichir personnellement puisque qu'ils s'engagent à reverser une partie de leur indemnité. Là encore c'est ce que j'appelle mettre en cohérence les paroles et les actes !
Il y a une très forte colère contre ces institutions que l'on perçoit de façon légitime comme un « rouleau compresseur libéral». Beaucoup sont alors tentés de ce dire : « moi je veux pas aller voter pour l'UE ». Que les chose soit claires : le 26 mai, moi je n'irais pas voter « Pour l'UE » mais, « pour l'Europe des gens contre l'Europe de l'argent ! ». On le sait tous : en votant ce ne sera pas suffisant pour gagner contre l'Europe du Capital, mais ce sera une première étape pour construire le rapport de force que j'évoquais précédemment. Il n'y a que les batailles que l'on ne mène pas qui sont perdues d'avance ! A l'inverse, lorsqu’on ne participe pas il est difficile de se plaindre du résultat par la suite...alors quand je vois ce que fait E. Macron aujourd'hui avec M. Le Pen en embuscade, je me dis que le « principe de précaution » doit prévaloir. Alors le 26 mai j'irais voter pour la liste du PCF menée par Ian Brossat. Puisque c'est un scrutin proportionnel à 1 tour, il n'y aura pas de séance de rattrapage, donc je vous invite à faire de même !