le 30 mai 2017
Ces derniers jours, la Commission européenne vient de faire l’objet de deux revers qui sont de nature à relancer la bataille contre les traités de libre-échange libéraux actuellement en négociations ou en cours, tels que le Ceta et le Tafta/TTIP.
C’est d’abord la décision rendue le 10 mai, par le Tribunal de l’UE qui a annulé la décision de la Commission européenne refusant l’enregistrement de la proposition d’Initiative citoyenne européenne sur le Tafta et le Ceta, suite à la collecte de plus de 3 millions de signatures réparties sur 25 États membres en septembre 2014. En effet, la campagne Stop TTIP/TAFTA avait par cette Initiative demandé l’arrêt des négociations du Tafta et la non signature du Ceta, qui avait fait l’objet d’une fin de non-recevoir au prétexte qu’elle sortait du cadre juridique prévu. C’est cette décision qui vient d’être annulée par le Tribunal de l’UE au nom du «débat démocratique».
C’est ensuite la Cour de justice de l’Union européenne qui vient de trancher que les accords commerciaux de l’UE incluant des clauses sur l’investissement ou sur le règlement des différents «investisseurs-États» relèvent bien de la compétence partagée de l’UE et des États, et ne peuvent être approuvés sans l’implication des États-membres. En cause était l’accord de libre-échange entre l’UE et Singapour, conclu le 20 septembre 2013, qui avait fait l’objet d’une saisine de l’instance supérieure de l’UE par la Commission ellemême, qui clamait sa certitude que l’UE avait seule compétence sur de tels accords.
Ce verdict démontre que la Commission n’était pas légitime pour négocier ces accords seule, au nom des États-membres, alors que la Commission européenne et la Direction générale du commerce s’arcboutaient à dire, lors des négociations sur le Tafta et le Ceta, que celles-ci étaient de la compétence exclusive de l’Union européenne. Ce verdict confirme également que certaines dispositions sur la protection des investissements ainsi que les mécanismes de règlement des différents investisseurs-États doivent être exclus du champ de l’application provisoire.
Ces décisions rouvrent le débat et la bataille anti Ceta et Tafta en France comme en Europe. D’autant plus dans la campagne des législatives qui s’ouvre en empêchant que le président Macron n’obtienne une majorité parlementaire lui permettant une ratification par la France rapidement. Notamment lorsque l’on se rappelle des déclarations d’Emmanuel Macron, alors candidat, lors des journées de Bruxelles à l’automne dernier: «Ce traité améliore objectivement les choses dans notre relation commerciale avec le Canada»…, tout en estimant «que le traité devrait être exclusivement ratifié au niveau européen et non devant les vingt-sept parlements nationaux»…, en concluant que «la politique communautaire commerciale, c’est la souveraineté de l’Europe.»
Et ce n’est pas sa déclaration d’entredeux tours de la présidentielle de demander à «une commission de scientifiques d’évaluer les impacts du Ceta dans les trois mois suivant son élection et qu’il ferait «modifier le texte» au besoin» qui est de nature à pouvoir rassurer, alors que sa première visite officielle en Europe a été d’aller rassurer Angela Merkel, sur sa vision politique cohérente, pro-européenne et libérale: un appui certain à l’accord économique et commercial global qu’est le Ceta.
Ces deux décisions sont une victoire et un nouvel espoir confirmant que le Ceta, ainsi que tous les accords de libre-échange futurs contenant des dispositions de protection des investisseurs, devront bien être ratifiés par chaque État membre, contribuant à renforcer le contrôle démocratique. Cela renforce la légitimité à exiger le rejet du CETA et les conséquences de ces mécanismes: l’abandon de toute ambition écologique et sociale future face aux intérêts des multinationales.
Nous avons l’occasion historique de le stopper en France, notamment en portant haut et fort cette bataille des législatives et en se donnant des dizaines de députés de gauche, PCF-Front de gauche, France insoumise et autres forces diverses capables de s’unir demain face à Macron et à ses soutiens de droite.
Laurent Péréa
Responsable adjoint aux Relations internationales
du PCF, chargé des questions de libre-échange
article paru dans Communistes du 24 mai 2017
source: http://13.pcf.fr/node/100302