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NATHALIE VERSIEUX BERLIN, DE NOTRE CORRESPONDANTE 7 JUIN 2015 À 19:29
En Allemagne, le chef du groupe parlementaire de Die Linke ne brigue pas sa propre succession
Angela Merkel n’aura bientôt plus de véritable opposition au Bundestag. Gregor Gysi, 67 ans, chef du groupe parlementaire de la gauche radicale Die Linke, a annoncé dimanche devant les 500 délégués de son parti réunis en congrès à Bielefeld qu’il ne se présentera pas à sa propre succession à l’automne. Les sorties de cet avocat est-allemand, mordant, drôle, voire sarcastique, sont de grands moments du débat parlementaire allemand, comme avec Joschka Fischer en son temps. Seul Gregor Gysi peut arracher à l’imperturbable Angela Merkel un sourire discret ou une mine irritée.
«PLACE À UNE NOUVELLE GÉNÉRATION»
Depuis que le SPD s’est allié à la CDU, l’opposition parlementaire est réduite à la portion congrue. Les Verts n’ont aucun dirigeant charismatique et Die Linke (premier parti d’opposition au Bundestag avec 64 députés) n’a que Gregor Gysi. «Il est temps de laisser la place à une nouvelle génération», a expliqué dimanche cette figure emblématique de la gauche allemande. Mais les candidats sont peu nombreux, et aucun n’a le charisme du sortant. «Il est l’un des meilleurs politiciens que le pays ait connu depuis la Réunification», regrette l’hebdomadaire Der Spiegel.
De fait, le député laissera un grand vide. Et, sans lui, une alliance de gauche SPD-Verts-Die Linke devient encore plus improbable. Favorable à un rapprochement avec le SPD, Gregor Gysi représente ce courant de la gauche radicale considéré comme fréquentable par la direction social-démocrate, par opposition aux déçus de la social-démocratie issus de l’Ouest.
En Allemagne, tout le monde connaît le visage poupin, les petites lunettes rondes, le regard aiguisé de celui qui a présidé la naissance de la gauche radicale allemande voici vingt-cinq ans, en créant le PDS sur les ruines du parti unique est-allemand SED. L’union des communistes est-allemands avec les déçus ouest-allemands de la social-démocratie en 1998 n’aurait pu se faire sans Gregor Gysi. Depuis la chute du Mur, il n’a cessé de décrier l’effondrement de l’industrie à l’est du pays, la hausse des inégalités, la réduction du montant des minimums sociaux ou encore les ventes d’armes allemandes à l’étranger. Très populaire, Gregor Gysi dispose d’un capital de sympathie certain à l’Est. Mais son image est aussi contestée: ses détracteurs sont convaincus depuis 1992 que Gregor Gysi a travaillé pour la Stasi du temps de la RDA. C’est lui qui se cacherait sous les pseudonymes «IM Notar» et «IM Gregor», les noms de deux indicateurs de la police politique de RDA Stasi, figurant régulièrement dans les archives de la Stasi.
Gregor Gysi a toujours nié ces accusations. En 2011, il a même répondu à une enquête de la chaîne de télévision publique NDR par une plainte argumentée de plus de 50 pages déposée devant un tribunal de Hambourg. Avocat redouté, Gregor Gysi est ainsi toujours parvenu à étouffer ce scandale potentiel, défendant aussi nombre d’Allemands de l’est s eux aussi confrontés à des accusations de collaboration avec le régime communiste. Pour certains Allemands de l’est, il est ainsi devenu le symbole de la lutte contre la culture ouest-allemande dominante.
Nathalie VERSIEUX Berlin, de notre correspondante
source:http://www.liberation.fr/monde/2015/06/07/gregor-gysi-s-en-va-et-laisse-merkel-sans-opposant-au-parlement_1324796