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BY ANDRE CRESPIN
06-10-2014
Ce dimanche 5 octobre a eu lieu au Brésil le premier tour des élections présidentielles. Dilma Rousseff, la présidente sortante, est arrivée en tête du scrutin avec environ 42 % des voix. Décrochera-t-elle un 4e mandat consécutif pour son parti, le Parti des Travailleurs (PT)?
La timide sortie du néolibéralisme entreprise par son prédécesseur Lula en 2003 ainsi que le développement de politiques visant à réduire la pauvreté devraient pouvoir se poursuivre si Dilma l’emporte lors du 2e tour face à la droite de Aecio Neves.
Grâce aux politiques axées sur les besoins sociaux, ce sont 40 millions de personnes qui sont sorties de la pauvreté depuis 20031. Les politiques redistributives mises en oeuvre ont permis que le coefficient de Gini du Brésil passe de 0,58 à 0,52 entre 2003 et 20112, faisant perdre au Brésil le triste record du pays le plus inégalitaire du continent. C'est entre autres à cause de ces réformes que Renato Rabelo, président du Parti communiste du Brésile (PcdoB) a appelé à soutenir la réélection de Dilma Rousseff en refusant le « retour de la période des vaches maigres pour les travailleurs ».
Le deuxième tour n'est toutefois pas joué d'avance. Dilma Rousseff y sera opposée à Aecio Neves, candidat du parti social-démocrate brésilien (PSDB) qui se positionne clairement à droite, recueillant 34 % des voix. Le danger pour Dilma Rousseff lors du 2e tour prévu le 26 octobre sera l’alliance probable entre Marina Silva, arrivé 3e au 1er tour, et le PSDB. Déjà avant les élections Fabio Vaz, mari de Silva, a essayé de construire une alliance entre Neves et Silva.3 Leurs programmes économiques pour le Brésil étant fort similaires, il n’y aurait rien d’étonnant à ce que Marina Silva, appelle à voter pour Aecio Neves.
Marina Silva, ancienne ministre dans le premier gouvernement de Lula, qui s'est servi d'un discours écologiste, a recueilli 21 % des voix. Candidate cette année pour le Parti Socialiste Brésilien (PSB), Silvadéfend un programme qui n’a rien à voir avec le socialisme. Elle souhaite notamment l’autonomie de la Banque Centrale, tel que le préconisent les recettes néolibérales4. Mais retirer le contrôle de la politique monétaire au gouvernement pour laisser le champ libre aux acteurs privés, revient dans les faits à empêcher l’Etat de tenir compte de ses programmes sociaux dans sa politique budgétaire. Pour le grand bonheur des actionnaires.
Par ailleurs, tandis que Dilma Rousseff avait soutenu fortement des projets d'intégration régionale, Marina Silva souhaite revenir sur l’accord économique du MERCOSUR (entre pays sud-américains) pour favoriser des accords économiques bilatéraux. Et les USA, impatients de racheter les entreprises brésiliennes à prix bradé, sont le premier pays avec qui elle veut signer un accord de libre-échange. Se tourner de la sorte vers les étasuniens serait néfaste aux accords régionaux qui se sont créés ces 10 dernières années. Ceux-ci ont pourtant permis au Brésil et à ses voisins latino-américains de faire contrepoids à l’hégémonisme étasunien dans la région.
Un deuxième élément pourrait compliquer la réélection de Dilma Rousseff. Bien que la réduction des inégalités ait continué à progresser durant son mandat, elle n’a pas su mener des changements radicaux sur plusieurs aspects importants de la vie des Brésiliens. On se souvient entre autres des protestations massives contre les dépenses pharaoniques engagées par le pays pour accueillir la Coupe du Monde de Football. Par ailleurs, en 2013, un mouvement de contestation sans précédent avait envahi les villes du Brésil pour protester contre la corruption et pour réclamer des améliorations radicales dans les transports publics, les soins de santé et l’éducation.
Pour Mauro Iasi, le candidat du Parti Communiste Brésilien (PCB), ces échecs sont dus au fait que le PT a été au pouvoir pendant 12 années mais n’a jamais mobilisé la population pour qu’elle s’implique elle-même dans les luttes politiques. La politique est restée exclusivement cantonnée au parlement et dans les ministères alors que la population exige de pouvoir s’y impliquer davantage.5 Pour le PCB, rompre ce cercle vicieux et mettre en avant les aspirations de la population est essentiel. Pour y arriver, il veut organiser des formes de pouvoir populaire pour que la population puisse non seulement être consultée mais également avoir une voix délibérative lors des décisions qui la concerne. La nouvelle présidente du Brésil aura-t-elle une ouïe attentive à cette inquiétude ?
1 http://www.lalibre.be/actu/international/le-bresil-vote-ce-dimanche-apres-une-campagne-a-rebondissements-5430e27d35708a6d4d5b8e89
2 http://novobloglimpinhoecheiroso.files.wordpress.com/2013/08/gini01.jpg?w=450&h=300
3 http://www.foreignpolicy.com/articles/2014/10/03/the_subtle_art_of_the_brazilian_majority?utm_source=Sailthru&utm_medium=email&utm_term=%2AEditors%20Picks&utm_campaign=2014_EditorsPicks10%2F03RS
4 http://www.legrandsoir.info/bresil-marina-silva-ne-laisse-aucun-doute-sur-son-projet-pagina-12.html
5 http://www.semanariovoz.com/2014/09/30/brasil-la-tarea-real-de-la-izquierda-viene-despues-de-las-elecciones-construir-la-alternativa-al-bloque-dominante/
(Photo: João de Bourbon, Creative Commons Attribution-Non-Commercial 2.0 License - See more at:http://portside.org/2014-09-27/brazilian-president-dilma-rousseff-leads-eve-crucial-vote#sthash.NYGH6VML.dpuf)
source:http://www.intal.be/fr/article/elections-au-bresil%C2%A0-un-ee-mandat-pour-dilma