Une revue de la presse internationale de ces derniers jours nous montre que l’Amérique latine est bien loin d’avoir la même opinion sur l’agression israélienne à Gaza que celle de nos gouvernements européens. André Crespin, d'Intal, a voulu confirmer ces informations en rencontrant René Fernandez, l’Ambassadeur de Bolivie à Bruxelles.
André Crespin
Evo Morales, président de la Bolivie, affiche clairement son soutien au peuple palestinien.
Quelle est la position du gouvernement bolivien sur le conflit en cours à Gaza ?
René Fernández. La Bolivie a dénoncé sans ambages les actions disproportionnées et brutales d’Israël. L’armée israélienne a massacré des innocents, des enfants, des femmes, des personnes âgées. Elle a détruit des maisons et l’appareil productif du peuple palestinien.
L’État de Bolivie avait déjà rompu ses relations avec l’État d’Israël en 2009 lors d’une agression similaire. Cette fois-ci, la Bolivie a condamné l’attaque israélienne et a demandé qu’il y ait une enquête et qu’une plainte pour génocide soit déposée à la Cour Pénale Internationale. Par ailleurs, la Bolivie a déclaré l’État d’Israël comme étant terroriste et a imposé des restrictions à l’obtention de visa pour les citoyens israéliens désirant se rendre en Bolivie.
Il est remarquable de constater que la Bolivie est loin d’être isolée dans sa condamnation d’Israël. D’autres États latino-américains comme Cuba et le Venezuela l’ont aussi fait. D’autres encore, comme le Brésil, le Pérou, le Chili, l’Équateur et le Salvador, ont rappelé leurs ambassadeurs respectifs pour consultation. Pourquoi existe-t-il un tel contraste entre les positions des gouvernements latino-américains et celles de leurs homologues européens qui sont loin de condamner les abus israéliens avec la même vigueur?
René Fernández. Comme vous l’avez dit, de nombreux pays latinos ont dénoncé ce qui a lieu aujourd’hui à Gaza. Les gouvernements du Venezuela et de l’Équateur l’ont fait. Le Nicaragua et le Salvador viennent de le faire.
Le sentiment partagé par les Boliviens est le suivant : on ne peut pas rester muet face à une telle agression qui se fait non seulement à l’encontre du peuple palestinien mais aussi de tous les peuples du monde. C’est un affront qu’un État se prétende de la sorte au-dessus du droit international. Nous croyons que les pays européens, avec cette position de soi-disant neutralité, ne sont rien d’autres que les complices des crimes israéliens. Et cette position des pays européens à l’égard d’Israël est la même depuis de nombreuses années.
Qui plus est, la structure actuelle des Nations Unies ne permettra pas de résoudre ce conflit. Car celles-ci ne défendent et favorisent qu’une certaine classe de pays et sont au service de l’impérialisme américain et de ses alliés. Israël ne ferait pas ce qu’il fait aujourd’hui s’il ne disposait pas du soutien des Américains. Les États-Unis ne sont non seulement le premier allié d’Israël, mais ils sont aussi les principaux opposants à toute initiative internationale visant à freiner Israël. Et les pays européens jouent sans broncher le jeu des Américains.
En Belgique et dans d’autres pays d’Europe, la population n’est pas toujours en accord avec les déclarations de ses gouvernements. Intal, comme d’autres associations, est active en participant aux manifestations de protestation, mène campagne pour la mise en place d’un embargo militaire avec Israël et participe au mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanction). En est-il de même en Amérique latine ?
René Fernández. C’est une bonne question. Car il est intéressant de constater que, quand bien même les gouvernements européens n’ont pas clairement condamné l’attaque, et sont donc complices silencieux de ce qui se déroule en ce moment, on ne peut pas en dire autant de l’opinion publique européenne. Que du contraire, un nombre sans cesse croissant d’Européens est sidéré par une telle agression. D’un autre côté, cela montre aussi que les gouvernements latino-américains sont en accord avec leurs peuples. Ce sont des gouvernements des peuples. Ce qui n’est pas le cas en Europe, car ils gouvernent à l’encontre des intérêts des grandes majorités bien qu’ils nous prétendent le contraire !
En Bolivie, la dernière personne à avoir appelé à manifester pour nos frères Palestiniens, c’est le président Evo Morales lui-même. Les organisations sociales boliviennes, qui n’ont pas eu besoin d’attendre l’appel du président pour se mobiliser, sont en train d’organiser les manifestations à venir de solidarité avec le peuple palestinien.
source: Solidaire
http://www.solidaire.org/index.php?id=1340&tx_ttnews[tt_news]=38770&cHash=879397140b852f031a6c0b12f13285a4