Bien entendu, les commentaires principaux des résultats des élections européennes du 25 Mai dernier ont porté sur le résultat du FN et l’effondrement des partis gouvernementaux.
Il y a cependant quelques faits importants qui ont rarement été mis en valeur
PNG - 42.9 ko Tout d’abord, tout le monde s’attendait à une nouvelle progression de l’abstention, or celle-ci recule légèrement, passant de 59,37% à 57,57%, presque deux points de moins. On peut dire que c’est négligeable et que cela représente presque autant que les blancs. Cependant, l’apparition du vote blanc, qui n’avait bien sûr aucun sens particulier puisque non pris en compte comme exprimé, donc équivalent dans les résultats au vote nul, réduit visiblement les votes nuls, le total des deux étant stable. C’est donc une surprise qui doit conduire à s’interroger deux mois après des élections municipales qui avaient vu, elles, une nette progression de l’abstention.
La spectaculaire progression du vote FN est dans ce contexte un message affirmé. Le vote FN a semblé pour 4 millions d’électeurs, un outil utile pour dire quelque chose. Même si les 3,5 millions d’électeurs FN 2014 de plus qu’en 2009 laisse encore 1,7 million d’électeurs FN des présidentielles dans l’abstention... En s’affichant en tête de ces élections, le FN a clairement gagné en légitimité et pèsera d’autant plus sur nos institutions et les rapports de force politiques.
Bien sûr, ce vote FN accompagne le rejet massif des partis gouvernementaux. La gauche gouvernementale perd près 750 000 voix sur 2009, plus de 6 millions sur les présidentielles, la droite perd autant, 450 000 voix sur 2009, plus de 6 millions sur les présidentielles !
PNG - 36.2 ko Mais ce n’est pas le PS qui prend la plus grosse claque ! Il ne perd que 200 000 voix sur 2009, alors que EELV en perd 1200 000 et que la gauche de la gauche (Front de Gauche et extrême-gauche compris) en perd 600 000 ! Il est vrai que les verts avaient entre temps fait un résultat calamiteux aux présidentielles, mais ce parti qui avait cru échapper à la critique en quittant le gouvernement deux mois avant les européennes prend de plein fouet le message du 25 Mai !
Et si la droite est bousculée (au total, elle perd 6% de ses voix de 2009), elle l’est moins que la gauche qui en perd 17%, et que la gauche de la gauche qui en perd 28% ! Mieux, en mobilisation réelle, donc en % des inscrits, elle perd moins de 2%, passant de 16,75% à 14,95% (divers droite + droite + centre), quand la gauche en perd 4, de 17,65% à 13,86 %. De fait, le total droite extrême-droite n’a jamais été aussi élevé, avec 61% des exprimés !
Il faut revenir sur le résultat du Front de Gauche, car les partis du Front de Gauche et d’extrême-gauche n’étaient pas au gouvernement ! A la différence de 2009 où le PC était encore marqué par la période de la gauche plurielle, les choses auraient pu être plus claires en 2014, après une campagne des présidentielles qui, semblait-il, enthousiasmait les foules des meetings, et avait, selon ses promoteurs, créé un évènement en imposant une nouvelle force politique rassemblée à la gauche de la gauche. Non seulement, le Front de gauche ne progresse pas sur 2009, mais il poursuit le double phénomène que toute analyse sérieuse des présidentielles avait déja mis en avant
- Le Front de gauche siphonne l’électorat d’extrême-gauche qui avait connu son apogée avec la doublette Arlette et Olivier approchant les 3 millions de voix en 2002 et en représentant encore 2 millions en 2007 avant la création du Front de Gauche. L’extrême-gauche s’est effondré en 2012 à 650 000 voix face aux 4 millions de Mélenchon et se retrouvent à 300 000 voix pour ces européennes.
- Le Front de Gauche accélère la fracture avec le vote communiste historique, devenant un vote de couche moyenne supérieure, désertant le monde ouvrier et industriel, les quartiers populaires, le monde du travail en général. La perte du député communiste européen, Jacky Henin, dans le nord ne fait que confirmer ce que nous avions décrit dans le détail sur lesrésultats des présidentielles.
Le message premier du monde du travail, certes déformé par l’absence d’outil politique pour l’exprimer autrement qu’avec l’abstention ou le vote FN, c’est bien que le peuple a en marre des promesses et des discours, y compris de celui du Front de Gauche sur l’Europe sociale, et qu’il veut en priorité rompre avec cette mondialisation capitaliste qui organise la guerre de tous contre tous. Il en a marre de cette Union Européenne qui organise et impose cette mondialisation aux peuples ! Il cherche qui et comment peut dire "STOP" !
Et cela explique pourquoi le boycott comme une arme pour faire s’exprimer la colère populaire, a eu tant de mal à sortir d’une discussion de spécialiste. Je reste convaincu que le peuple veut s’exprimer pour dire NON à l’UE et l’Euro, et que c’est l’absence d’un parti communiste portant nationalement cette exigence qui rendait inaudible cette campagne de boycott qui ne pouvait avoir un sens que sur le long terme, dans le cadre d’une vraie stratégie de reconquête de l’expression politique de la classe ouvrière. De fait, le peuple veut dire quelque chose sur l’UE et il est trop souvent prêt à le dire coute que coute quand il ne baisse pas les bras.
La conclusion logique que devraient en tirer tous les communistes est de demander en urgence à la direction de cesser de faire l’autruche, de dire la vérité sur ces évolutions électorales auxquelles nous poussent le Front de Gauche, et de reconstruire une stratégie politique centrée sur le monde du travail, les questions auxquelles il est confronté et la nécessité urgente de l’aider à se reconstruire une capacité d’action politique. La remise en cause du discours idéaliste et institutionnel sur l’Europe sociale est le prérequis absolu sans lequel, le PCF ne peut que disparaitre. La crise du PS pouvant aller loin, il n’est même pas sûr que le PCF puisse, comme le parti radical, transformer sa longue histoire en quelques sièges dans les valises du PS...
Et pour ceux qui savent que la direction du PCF, minée par ses contradictions internes, les luttes de clans, et les nécessités institutionnelles, ne choisira ni la vérité ni l’effort militant, il ne reste que l’engagement personnel et collectif dans un énorme effort d’organisation des communistes, un énorme effort de rassemblement populaire. Mais la victoire des Fralib face à une des plus grandes multinationale, démontre que les travailleurs déterminés et organisés sont la clé des rapports de forces !
auteur:pam