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Par Atilio A. Boron *

Buenos Aires, 4 novembre (Prensa Latina) L’obsession nord-américaine pour réaliser le 'changement de régime' tant désiré à Cuba a atteint des extrêmes inexplorés sous la présidence de Donald Trump.


Si la nécessité d’incorporer l’île rebelle dans la juridiction des États-Unis remonte à 1783, date de la fameuse lettre envoyée de Londres par John Adams aux autorités des Treize Colonies à peine indépendantes pour les exhorter à agir en conséquence, le passage du temps n’a fait qu’exacerber une telle prétention malveillante.

D’autant plus que le 1er janvier 1959, Fidel et ses compagnons en ont fini avec le pion sanglant à qui la Maison Blanche avait confié la gestion de Cuba, comme une possession proche et très pratique d’outre-mer. Un endroit où le pouvoir des grands entrepreneurs, le gouvernement des États-Unis, la classe politique et la mafia pouvaient se réunir pour élaborer leurs plans face à face et à l’abri des lois et des yeux de l’opinion publique nord-américaine. Tout cela a été décrit avec maîtrise dans le livre de Mario Puzo, Le Parrain II, et dans la magnifique version cinématographique de son livre.

Mais c’est là que Fidel est arrivé et tout s’est écroulé. Depuis lors, le gouvernement des États-Unis n’a cessé si ce n´est une minute de conspirer contre la Révolution cubaine. L’île « leur appartenait » et ils n´ont pas toléré qu’on la leur enlève.

La frustration et l’agressivité se sont accumulées à mesure que la révolution avançait et se consolidait, à seulement 90 milles de leurs côtes. Pour couronner le tout, c’était (et c’est) un très mauvais exemple, parce qu’il démontre que si un pays sous-développé et faiblement doté de ressources naturelles est libéré du joug impérialiste, ses représentants locaux peuvent offrir à la population des droits d’exigibilité universelle (à la santé, à l’éducation, à la sécurité sociale) qui, aux États-Unis, sont des marchandises très coûteuses et qui ne sont pas accessibles à tous.

Année après année, les taux de mortalité infantile à Cuba, qui ne sont comparables qu’à ceux des pays les plus développés du monde, sont une gifle à l’arrogance des États-Unis et une preuve irréfutable de l’inégalité du capitalisme. L’audace cubaine, pour le dire simplement, est inadmissible et intolérable et il est urgent d’y mettre fin.

Donald Trump, un mauvais garçon de soixante-dix ans, grossier, capricieux et violent, a sûrement dû entendre des voix lui dire que telle était sa mission dans l’histoire. Fidèle à cette hallucination, il a lancé une attaque sans précédent contre Cuba, dans une vaine tentative de ramener l’île à son état néocolonial.

Il rêve d’un nouvel amendement Platt, l’ajout scandaleux à la Constitution cubaine imposé après l’occupation nord-américaine qui légalisait sa soumission absolue à Washington, pour ainsi rentrer dans l’Histoire avec un chimérique « Amendement Trump » qui consacre l’annexion définitive de l’île à la juridiction des États-Unis.

Le pauvre ne sait pas à qui il a affaire. Entouré de truands et de plus que médiocres conseillers, il pense qu’en redoublant d’agression contre Cuba, il fera tomber son peuple à genoux et qu´il jurera fidélité à un homme comme lui. Gyorg Lúkacs disait qu’un lapin au sommet de l’Himalaya était encore un lapin. Assis sur le trône impérial, ce petit animal serait aussi ce qu’il est.

C’est la même chose pour Trump. Furieux parce qu’il est conscient que le déclin de la puissance étasunienne est lent mais irréversible, et parce qu’il sait que dans moins de 10 ans la Chine dépassera économiquement son pays (comme c´est déjà partiellement fait, avec l’avantage conquis par le géant asiatique sur la technologie stratégique 5G).

Il est donc impuissant dans son désir de mettre le géant asiatique et la Russie sur le trottoir et de jouer un rôle d’arbitre au Moyen-Orient après l’échec de l’aventure impériale en Syrie; irrité par la désobéissance timide mais croissante et les hésitations de ses alliés européens qui le perçoivent comme un despote imprévisible et prétentieux ; ennuyé avec ses laquais latino-américains qui ne parviennent pas à extirper le 'populisme' (Vargas Llosa Dixit) de leurs pays ou par des présidents incapables de soutenir le modèle néolibéral sans des turbulences menaçantes (Piñera au Chili, Moreno en Équateur, ou Macri en Argentine).

Ayant besoin des votes de la Floride pour le prochain scrutin présidentiel, il s’est lancé avec une maladive hostilité contre Cuba. Pas moins de 187 résolutions ont été adoptées par son gouvernement pour harceler l’île : décrétant l’activation du chapitre III de la Loi Helms-Burton, qu’aucun président des États-Unis n’avait jugé bon d’appliquer, jusqu’à une série interminable de sanctions économiques et de restrictions destinées à plonger les cubains dans des difficultés et des privations, avec l’espoir que cette situation déclencherait une explosion sociale qui mettrait fin à la Révolution.

La liste serait interminable : interdiction des vols des compagnies aériennes nord-américaines vers ou depuis les aéroports de l´île excepté celui de La Havane; sanctions pour les tankers transportant du pétrole à Cuba ou pour les navires transportant des marchandises en provenance ou à destination de l’île, après quoi ils ne pourront plus amarrer dans aucun port des États-Unis pendant six mois.

Interdiction également d´accoster dans n’importe quel port cubain pour les nombreux navires de croisière qui sillonnent les Caraïbes; sanctions contre les banques qui participent au commerce extérieur de l’île; limitation des envois de fonds que les cubains résidant aux États-Unis peuvent envoyer à leurs familles; blocage sélectif de l’importation de médicaments et de denrées alimentaires; interdiction de louer à Cuba des avions et pression sur les compagnies aériennes étrangères pour qu’elles réduisent ou suppriment de leurs itinéraires toute ville cubaine ; interdiction d´exporter vers l´île des produits ayant plus de 10 pour cent de technologie ou d’intrants originaires des États-Unis…

Tout cela devant la complicité des gouvernements des pays européens, de l’Union Européenne, prétendue réserve morale de l’Occident et héritière de la tradition kantienne de paix et de fraternité universelles, qui admettent, comme s’il s´agissait de républiques en carton peint (et en fait cela parait être le cas), l’extraterritorialité des lois étasuniennes et l’agression du 'Gorbatchev américain' -comme un très lucide ami cubain le baptisera- contre tous ceux qui s’opposent à sa puissance, que ce soit Cuba, le Venezuela ou le Nicaragua dans Notre Amérique.

Trump doit ignorer l’histoire de David et Goliath. Les Cubains ont résisté à 60 ans de blocus du Goliath du nord et ils résisteront à 60 ans de plus. Il apprendra cette leçon en chair et en os quand, dans peu de temps, il commencera son voyage sans retour dans les toilettes de l’Histoire.

Peo/arb/Aab

*sociologue, politologue, professeur et écrivain argentin. En 2009, il a reçu le Prix International José Martí de l’UNESCO.

source : 

http://frances.prensa-latina.cu/index.php?option=com_content&view=article&id=883032:trump-atteint-les-187-resolutions-contre-cuba&opcion=pl-ver-noticia&catid=69&Itemid=101

Tag(s) : #Trump, #Blocus, #Cuba

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